Carnet 18 – Du 8 février 1978 au 5 juin 1978
08/02/1978
VÉCU
1h30 du matin
J’écris couché – pour la première fois ici – dans mon lit avec draps et couvertures. La merde des meubles est finie (juste les planches de la bibli qui sèchent). Bertrand, premier ami à passer la porte, est venu m’aider à mettre la moquette en place et me voilà installé.
Ce matin, je suis allé voir l’avocat, le mari de Jacqueline V.
Première action : une lettre. On va voir comment elle réagira.
Dîné ce soir avec Bertrand, son père et François Maistre avec qui un bon contact s’est établi.
09/02/1978
TÉLÉVISION – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
R. m’a dit qu’un journaliste à qui elle avait proposé un 50 minutes avec moi a refusé parce que « je n’étais pas sécurisant »… !
Voilà une chose qui me fout en boule et réveille ma vieille parano. Et moi ! Qui me sécurise ?
10/02/1978
VÉCU – FEMMES – CINÉMA – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Sabine
200 118 118 02
Bertrand m’a appelé ce matin (il est 1 h. J’écris au petit restau d’en face où je viens déjeuner because pas fait de courses : rien à la maison). Il m’a filé son numéro. Petit pincement : encore une galère ? Devrai-je ramer ?
Hier soir : été chez Sario pour enregistrer boulot avec lui. Il y avait son frère, Giorgio. C’est finalement lui que j’ai enregistré. Il a parlé longuement de l’univers des boîtes et du fric. Très utile. Très dément.
Pas de réponse à la lettre de l’avocat. Je pense qu’elle va faire la morte, faire traîner les choses.
Agnès me manque de plus en plus. Je ne sais comment elle est, comment ça se passe. A-t-elle senti, compris ?
Je sors beaucoup le soir. Dans la journée aussi, j’ai toujours quelque chose à faire. Sauf aujourd’hui où je traîne ma flemme – mais c’est un peu normal après cette panique des meubles, du ponçage et du vernis – pourtant il faudrait que je fasse le ménage, il y a une tonne de crasse et de sciure sur toute chose et des affaires en vrac à droite et à gauche.
La musique me manque. Et mes livres. La bibliothèque, terminée, fait très vide.
Jean-Pierre Bertrand au « Magazine de l’image ». Parlé de mon sujet sur les jeux. Ça a l’air de l’accrocher. Je dois l’écrire. J’hésite à le faire dès maintenant ou après avoir fait le compte des jeux existants.
Bouillon : en sommeil car il est occupé par un dossier d’agrément au CNC.
Reggiani : j’attends. Si ça marchait avec Bouillon, j’envisagerais d’aller le voir en tournée.
Toutes les lignes que j’avais lancées, ça ne mord pas : Armorial, Mnouchkine, Rassam, Roitfeld, Kermadec, Office Kréation. Sans compter les « consultants » : Miller, Fansten, Monnier et autres.
Mais ça ne me chaut que peu.
Mon emploi du temps récent (en remontant) :
Hier, jeudi : soir : Sario. Assedic. Conférence Aujourd’hui Madame.
Mercredi : soir avec Bertrand, son père et François Maistre. Jour : fini meubles. Avocat le matin.
Mardi : soir théâtre avec les C. (dormi chez eux dans le lit de Caroline). Après-midi : AFI.
Lundi : soir : dormi chez Jean-Claude et Sido cause vernis.
Je m’aperçois que ça fait trois semaines que je suis parti (plus : 26 jours ! presque un mois). Temps passé très vite : un mois déjà ! Déjà l’hôtel des premiers jours, les petites annonces, les visites d’appartements, tout ça m’apparaît très loin. Déjà j’ai mon passé à moi, à moi seul.
Hier en rentrant avec Sario chez lui, lorsque sa nana lui a fait la gueule parce qu’il était tard, j’ai ressenti ça comme intolérable, insupportable, ces relations de couple, d’oppression mutuelle, de reproches, cette angoisse pas possible.
Ah être seul, être libre, malgré les mauvais moments, les moments de manque, d’ennui. C’est quand même précieux.
En ce moment, il fait gris et très froid, c’est la seule chose qui me gêne.
Vivement le printemps. C’est drôle comme ça ressemble à 74, de ce point de vue-là : jours d’hiver (et même de neige) puis jours radieux du printemps (cerisier par la fenêtre de la cuisine des Coudreaux). L’ai-je voulu ?
Je viens d’accrocher au mur des posters achetés il y a déjà quelque temps : Turner « Le paquebot Téméraire », « Wings of Love » et un petit Magritte.
12/02/1978
VÉCU – FEMMES
Anefrance
326 88 67 → comédienne rencontrée aujourd’hui chez Michel et avec qui j’ai pris un verre en la raccompagnant à la gare de Chelles.
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Michel projetait des films super 8 de vacances. « T’as pas un film où je suis ? » ai-je demandé niaisement.
Il m’a passé un film fait chez lui, aux Coudreaux, et j’ai revu Agnès. À trois ans environ. Pris ça dans la gueule. Un grand coup de cafard. Ça a réveillé en moi des tas de choses.
D’abord : sa pensée. Je m’aperçois ce soir combien elle me manque. Combien plus que je ne crois.
Le choc, en la revoyant petite. Le choc de me rendre compte que j’avais oublié son visage de cette époque. Tous les visages de son enfance. Pourtant pas si loin.
Le remord. La culpabilité d’avoir laissé le temps passer, implacable, irréversible, et de ne pas m’être assez occupé d’elle, de n’avoir pas suivi mieux son évolution, le changement de son visage, de son être.
Affreusement coupable ce soir. À en pleurer. Et puis : moi, dans le coup. Si je ne m’en souviens pas, c’est que je n’ai pas vécu cette enfance d’Agnès assez intensément. L’intense marque. Et pas intense parce que je n’étais pas heureux. N’est-ce pas une théorie ? Je ne crois pas.
Ce temps qui ne reviendra pas. Ces bouts de pellicule, seule trace de ce temps. Déchirant.
Et son visage… Ce visage grave, ces grands yeux qui fixaient la caméra. En voyant cette gravité, en connaissant son fond de gravité, je me prends à douter qu’elle encaisse bien mon départ. Et J’ai affreusement peur.
Je mesure, ce soir, mon égoïsme.
Ma fille, mon enfant, ce soir je pense à toi je pleure..
13/02/1978
TÉLÉVISION – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Déjeuné avec R.. Parlé longuement. Me suis défendu.
14/02/1978
ÉCRITURE
« Mon désir pour toi est d’une grande puissance… »
THÉÂTRE
Théâtre des Amandiers à Nanterre.
Pièce de Handke avec Depardieu.
Je suis sorti tant ça me faisait chier.
Françoise et Dany, sa copine, sont sorties aussi.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Appartement-témoin : Francine dans un bistrot. Un mec la mate, contre la vitre. Elle lui balance du café à la gueule qui s’écrase sur la vitre.
THÉÂTRE – ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
From pièce de Handke.
Faites la poussière…
C’est nickel. Le valet passe son doigt. Il ne trouve rien. Il sort.
Plus tard : il revient avec un énorme aspirateur = garder la structure.
VÉCU – AGNÈS -1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
En ce moment, c’est le creux de la vague. Je vais mal. Branlettes tous azimuts et ce soir, one more time, une pute et l’impuissance. Je prends conscience de plusieurs choses : mon inconscience de ce qui m’attendait réellement en partant. Et de ce qui attendait Agnès. Le fait que je m’abîme dans une agitation frénétique pour combler mon vide. Mes difficultés de communication avec les autres. Ce côté hyper-susceptible, hypertendu, confinant à la schizophrénie à la parano. Le fait que je ne m’aime pas (tout en aimant) et que, par suite, je ne peux aimer les autres (tout en les aimant). Mon rapport aux femmes m’inquiète. Mon rapport à la vie aussi. Mon rapport à moi aussi. Pourtant, quand je considère les choses avec tant soit peu de recul, je me dis que ça ne va pas si mal. Qu’il me faut de la patience. Un peu de patience. Je n’attends qu’une chose : une femme. Le boulot : c’est l’attente aussi, mais celle-là, je la connais et je peux plus ou moins la combler.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
« Quoi de neuf ? »
« Y a que du vieux. »
« Si c’est pas malheureuse… ! »
15/02/1978
ÉCRITURE
Ce matin, au réveil :
« J’aime la vie. Mon cœur a accéléré quand j’ai commencé à vivre… » (inclus dans Manuscrit « L’homme que les plantes aimaient »)
15/02/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
J’ai appelé Jocelyne pour savoir si elle avait reçu la lettre de l’avocat. Pas reçu. Elle a parlé à Agnès : « Papa préfère vivre seul. »
D’après ce qu’elle dit – et je la crois – Agnès n’en parle jamais « Ne me parle plus de cette affaire ». Je l’ai eue au téléphone. Elle a pleuré un peu, mais ça s’est arrangé. En repartant, elle a passé le téléphone en demandant à Jocelyne « Tu vas pas pleurer ? » Jocelyne accepte que je la prenne ce week-end.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Appartement-témoin :
Titres de livres que lit François :
« Le vieil homme et sa mère »…
(etc.)
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Francine : « Je préfère travailler que de faire le tapin ou me taper des vieux pour le fric… »
Bien lié ! Étudier les hiatus
Francine et Marco :
Francine : « Tu m’offres un verre ? »
Marco : « Non. »
Francine : « T’es salaud ! »
Marco : « C’est une question de principe : j’offre jamais rien à une femme (Il faut qu’elle m’aime pour moi-même, pour mon chapeau/mes beaux yeux). Y a eu l’année de la femme, non ?
VÉCU – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – FEMMES
Parlé tout à l’heure au bistro rue Monttessuy avec… (rajouté le 07/08/2017 : Brigitte Simonetta) (je ne réussis pas à me souvenir de son nom).
Beau moment entre nous. De sa part des mots simples, chaleureux et ce merveilleux sourire qui en fait une enfant en même temps qu’une femme.
Elle ne comprenait pas que je me haïsse à ce point. J’avais dit, suite à Chalut, que, ne m’aimant pas, je ne pouvais être aimé des autres.
« Mais tu es aimable » m’a-t-elle dit.
J’ai rêvé. Mais je crois qu’entre elle et moi, il y a une histoire. Et puis l’expérience m’a appris à ne plus vouloir aller vite (même si, avec Cosette, je suis allé trop lentement).
« Quelqu’un à qui on peut faire confiance » a-t-elle pensé de moi en me voyant la première fois.
16/02/1978
VÉCU – AGNÈS – ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE (à classer aussi dans cette catégorie)
Une idée de court-métrage qui me vient en me voyant en train de discuter avec Agnès dans un bistrot :
C’est attendrissant un père avec sa fille dans un café, comme image. C’est joli, ça provoque un sourire. Mais moi, je le vis avec plein de choses dans le coeur et comme un noeud dans le ventre. L’image ne restitue pas l’émotion des « personnages » →
Un film qui serait « vu » par un spectateur d’abord en amorce, puis se retirant disant « Prenez ma place ». Un spectateur qui remarquerait le « joli », « l’émouvant », qui aurait le regard « tranquille » du spectateur-type. Tout un film où le texte serait – ironiquement, férocement – anesthésiant (soulignant la distance spectateur-image).
17/02/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Demain je verrai Agnès pour la première fois depuis un mois, jour pour jour. Je suis angoissé à cette idée et aussi contrarié parce que j’ai voulu – peut-être par inquiétude – assurer à Agnès la présence d’autres enfants, en l’occurrence Raphaël, le fils de Sido et Jean-Claude et que je ne sens pas de bonnes vibrations autour de ça.
Je me tâte pour passer le week-end seul avec elle, mais maintenant c’est arrangé comme ça et il faut que je contre ma parano, car ce qui compte, c’est Agnès et non moi. À cet égard, elle préférerait peut-être être seule avec moi. Je vais peut-être le lui demander demain matin.
Je suis très angoissé, mécontent de moi, comme toujours, estimant que je ne me surveille pas assez. Comment vivre ainsi ? Quel père suis-je pour elle ?
Jocelyne au téléphone m’a dit qu’elle ne pouvait vivre seule et qu’elle se remarierait probablement et qu’elle aurait ainsi un homme solide. Tout se confirme. Je suis lamentable. Il ne faut pas que je pleure demain.
TÉLÉVISION – ÉCRITURE – PROJETS
Vu Chabartier. Parlé de « La route ». Il en cause à ses mecs. Suite à quoi, si ça les intéresse, on essaiera d’intéresser Dordhain.
Pourquoi pas ?
VÉCU – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – ÉCRITURE – CARNET
Si j’écris plus ma vie qu’en 74, c’est sans doute dû à ma solitude, que je peuple de ces signes.
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Jocelyne m’a dit qu’Agnès avait fait deux fois caca au lit et qu’elle venait parfois dans son lit.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Giorgio : « Ce que le fric permet : rencontrer des gens intéressants, d’un autre milieu. »
À exploiter.
VÉCU – FEMMES
Virginie, que je vois lundi soir. J’en ai envie. J’en doute.
VÉCU – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Je me suis relu. Comment puis-je écrire que seul le froid me gêne ?
Je suis en crise.
La crise, avec ses masques.
Le froid, ça voudrait dire quoi ? La solitude ?
Je n’ai jamais tant écrit le mot « solitude ».
Je patauge dans l’échec, dans l’inaccomplissement, dans l’incomplétude, dans mes limites, dans le piétinement, dans l’insatisfaction, dans le dérisoire, dans le ridicule, dans la lâcheté, dans la paresse, dans l’erreur, dans le désespoir.
18/02/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Chez les L.. Agnès, Carole, Raphaël. Agnès a tenu à venir voir comment c’était « chez moi ». Bertrand regarde un match de rugby. J’ai l’impression – et est-ce bien certain ? – qu’Agnès prend assez bien les choses. En tout cas, ne refuse pas la situation.
Tout à l’heure, j’étais bien. Maintenant, ce rugby me fait chier. (J’ai agressé Bertrand).
Agnès mange une crêpe, assise près de moi sur le lit. Elle n’en veut plus, Raphaël la remporte, elle sort.
Elle me mord assez souvent
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
« C’est comme un môme qui se met à pleurer, tout d’un coup, sans que tu comprennes pourquoi, parce que tu as déplacé quelque chose ou tu lui as enlevé un truc qui a l’air sans importance pour toi, mais pour lui c’est vachement important et tu es tout étonné qu’il se mette d’un coup à sangloter comme ça, avec un vrai chagrin, le cœur gros et tout le truc… »
19/02/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Premier week-end avec Agnès. Dimanche soir. J’écris couché. Bilan :
Ça s’est bien passé jusqu’à ce soir, où ça a coincé. À partir d’un accrochage avec Carole qui, sans doute, manquant de tendresse, « se venge » sur Agnès.
Agnès s’est mise à pleurer, s’en prenant à moi : « Tu veux pas rester à la maison, tu nous laisses, Maman et moi, je vais m’inquiéter et m’ennuyer. »
Tu as l’école, des petites copines…
Elles sont méchantes.
Toi aussi, ça t’arrive d’être méchante, tu as ton petit caractère, c’est normal.
Larmes. Je tente de la consoler, silencieusement, la tenant dans mes bras. Silence autour de nous. Tout le monde sent que c’est grave.
Plus tard, dans la voiture, je lui parle. J’essaye de lui expliquer notre désaccord, Jocelyne et moi, mais que, si je suis parti, je l’aime toujours aussi fort. Je lui explique qu’elle ira un week-end avec sa mère, l’autre avec moi. Elle m’avait demandé avant : « Pourquoi tu viens pas en week-end avec Maman et moi ? »
Elle accepte apparemment bien l’idée de partage. Un moment : « Maman, elle touche rien, avec son travail. » Je lui explique qu’elle ne manquera jamais de rien.
Elle me demande, quand je lui dis que je l’aime grand comme le ciel « Tu aimes pas les autres enfants »
Je les aime bien, mais pas comme toi. Je t’aime plus que tout au monde.
Elle se calme, sèche ses yeux, suce ses pouces, l’air grave, puis se distrait avec son arbalète en tirant des fléchettes sur le pare-brise.
Arrivé à Pierrefitte, je retranscris tant bien que mal cette conversation à Jocelyne qui me chasse, très agressive « Je préfère ne pas te voir ici » et m’accuse d’avoir tardé à venir la chercher samedi matin.
« Tu t’es pas ennuyée ? » a-t-elle demandé à sa mère en arrivant.
À un moment, dans la voiture : « Tu es une grande fille, maintenant »
Oui, je suis grande. Et je comprends tout.
VÉCU – FEMMES
Hier soir, chez les B., rencontré Pierrette, qui me plaît, qui a l’air d’être une fille bien.
VÉCU – AMIS – BERNARD D.
Reçu de C. un aérogramme alarmant.
19/02/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Agnès :
Jardin couvert de neige. Immaculée. Vierge. Je lui conseille de quitter l’allée pour laisser l’empreinte de ses pas. En partant, elle refait la même chose, mais en marchant à reculons.
20/02/1978
VÉCU – FEMMES
Molière Goldoni
Clichy à partir du 15 mars ou début du mois ← réveillé par « Anefrance » (Annette, c’est plus joli, c’est plus soubrette).
Jolie voix, qui me remercie de lui avoir filé le numéro d’Audouard.
J’appelle Pierrette.
Longue conversation au téléphone. Une fille qui a eu, a, aura beaucoup de problèmes.
Entre autres : problèmes de fric. Je lui propose aventureusement de lui en prêter. J’ai confiance en elle. Je la rappelle à 2h 30.
VÉCU
J’appelle Stefan pour le ski. Il émerge. Il va me rappeler.
Il y a du soleil dehors. On sort toujours du tunnel. Sauf de celui qui n’a qu’une entrée.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
(À partir d’une pensée : Pierrette et sa fille de 15 ans. Comment était Pierrette il y a 15 ans ? Qui était elle ? )
→ Je la rencontre à cette époque et je lui dis : « On se rencontrera dans 15 ans. vous serez divorcée. votre fille aura 15 ans. vous en aurez une autre de 12. Nous nous aimerons ( ? ). «
Sa réaction. nos rapports à ce moment.
VÉCU – MUSIQUE
J’écoute McCartney à la radio.
Miracle des moments où la musique s’accorde à nos sentiments (et les colore).
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
Chez François :
Une carpette qu’il foule aux pieds dès son réveil sur laquelle on lit : « Patrons – flics – percepteurs – adjudants – (etc.… »
20/02/1978
ÉCRITURE
« Un joint stupéfiant… » (2014 : from Internet : fait)
VÉCU – FEMMES
J’ai rappelé Pierrette qui n’était pas là. Demandé qu’elle me rappelle si elle rentrait avant 6h30. Il est 6h30.
Totor m’a appelé : Emmylou, c’est ce soir. Je vais y aller avec la petite Virginie avec qui je suis de plus en plus sûr que rien ne se passera.
VÉCU – ÉCRITURE – MUSIQUE
Commencé (enfin) à taper conversation enregistrée avec Zyf.
Arrêté pour écouter.
Au passage : la petite musique de Pierrot m’a arrêté. Réécouté plusieurs fois, j’aime ces notes claires de guitare.
20/02/1978
ÉCRITURE
« Note claire »
20/02/1978
ÉCRITURE
Une note claire dans notre vie…
VÉCU – MUSIQUE
J’écoute Stevie Wonder. Je chantonne dans ma tête, en approuvant de ma tête le rythme dont la voix décolle pour des envolées pleines de joie.
20/02/1978
IDÉE – TÉLÉVISION
Pour « La route » : monter « Nationale 7 » de Trenet, chanson optimiste et charmante, sur des images d’autoroute, d’embouteillages et d’accidents.
VÉCU – FEMMES
Virginie : nada.
Mais de toute façon, je n’en ai plus envie.
Elle est trop gosse et maintenant il y a Pierrette.
Michel vient de m’appeler. Évelyne : « Pierrette a appelé. Elle a dit qu’elle avait rarement vu un type aussi gentil… »
Je me souviens du regard de Bertrand quand Pierrette s’est levée et que j’ai suivi son corps des yeux.
21/02/1978
VÉCU – FEMMES
On est mardi. Il est 10 h du soir. J’écris couché.
Toute la journée, j’ai attendu le coup de fil de Pierrette, toute la journée.
Ne le voyant pas venir, j’ai senti monter en moi un flip de plus en plus intense. J’en suis arrivé, fatigué, n’ayant pas assez dormi (me suis endormi à 4h cette nuit) à descendre m’asseoir devant le standard de l’AFI, guettant, mine de rien, les conversations téléphoniques.
Je ne comprends pas : me suis-je exagéré la profondeur de notre contact ? A-t-elle décidé de ne pas m’appeler par fierté, parce que je l’avais vue dans la merde et lui avait proposé du fric ? A-t-elle peur de moi, de m’aimer (hypothèse dont je souris incrédulement) ?
En rentrant à la maison, je n’ai pas résisté et l’ai appelée. Ça ne répondait pas. C’est tant mieux comme ça.
J’appréhende de l’appeler demain matin.
Pourtant j’ai envie d’être avec elle.
Ce soir, au comble de la frustration : branlette.
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Eu tout à l’heure une conversation téléphonique avec Jocelyne.
D’abord orageuse : elle m’a traité de salaud, pensant que j’avais voulu monter Agnès en lui disant qu’on s’était disputés.
On a hurlé tous les deux. Elle a raccroché. Puis elle m’a rappelé, on a parlé plus calmement. Je me suis défendu. Je dois y aller jeudi avec l’ampli.
VÉCU – FEMMES
Ce soir, je me sens seul. J’en ai marre de sortir avec des copains. J’ai besoin d’une femme, nom de Dieu !
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
Trouvé un aménagement à mon idée du type qui remonte le temps pour aller voir la femme qu’il aime et qui l’aime 15 ans plus tôt pour la prévenir qu’ils s’aimeront.
→
Même chose mais sans voyage dans le temps. Tout voulu par lui. Il a disons 20 ans et décide d’aller voir une fille de 20 ans ( mettons qu’il la voie dans la rue ou bien qu’il la connaisse à travers un événement précis qui la magnifie ou lui assure qu’elle est aimable. disons un événement auquel il assiste avec un copain et tous deux tombent d’accord sur le fait qu’elle est une fille fantastique, l’événement le prouvant. quel événement ? )
Il va donc la voir et lui affirme que dans 15 ans ils se retrouveront et s’aimeront.
Pendant 15 ans, il ne la perd pas de vue. suit ses déménagements, les événements de sa vie, etc.
15 ans après, il s’arrange pour la rencontrer comme par hasard ( ou en lui rappelant leur rencontre 15 ans avant ? ) que se passe-t-il alors ?
– Elle ne l’aime pas. Il se suicide.
( Le film peut être en voix off. lettre écrite au copain du début plus ou moins perdu de vue depuis. )
VÉCU – FEMMES
« Chance de sa vie » ?
←
Je viens d’appeler Évelyne qui m’a parlé de Pierrette. Et quand je relis les pages précédentes, je m’en veux de mon impatience stupide, de la violence bornée de mon désir, d’avoir démoli en un instant de branlette l’édifice solide de mon désir, de mon élan, de ma tendresse, de mon enthousiasme. Il va falloir reconstruire, revenir à la réalité de la femme, à la présence de l’être humain, aux bras noués autour du cou, au sourire lumineux et confiant. À la confiance.
J’ai douté. J’ai eu tort.
22/02/1978
VÉCU – FEMMES
Ai-je eu tort de douter ?
Appelé Pierrette ce matin. L’histoire de fric traîne entre nous. « Ça la dépannerait, mais ça la gêne ». Je devais donc rappeler à 4h pour savoir où elle en était. À 4h, j’ai rappelé, n’était pas là et n’avait pas laissé de message pour moi ni rien.
J’ai encore rappelé. Deux fois. J’ai dit qu’elle m’appelle ici à la maison. Il est 7h. Elle ne m’a pas appelé.
Ne m’appellera sans doute pas.
À la limite, peu importe (c’est faux), ce qui compte, c’est d’être lucide : je me monte la tête. Je vais me discréditer complètement en n’arrêtant pas de lui cavaler après comme ça. Je n’appellerai plus. À elle de jouer. Mais cette histoire de sports d’hiver m’emmerde : partir avec elle, ses gosses, etc. sans savoir si je ne m’embarque pas dans une galère, ça m’emmerde beaucoup. Envie de geler (!) les sports d’hiver en prétextant du boulot, mais ça m’emmerde aussi de ne pas y aller. (Quoique : je pourrai y aller après).
TÉLÉVISION – CINÉMA – PROJETS – ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Ça, c’était pour ma vie « sentimentale » chaotique et inexistante.
Sinon :
– Vu Jaume. Niogret n’aime pas « BPEF ».
– Chardeau : pas lu.
Mais il me dit que tous les films qu’il produit ont une avance sur recettes.
– Bouillon. Reggiani : rien.
– Miller : je l’ai appelé. Il n’aime pas ma Francine.
Alors je vais modifier la structure de ce bordel de merde de film.
Francine : pas salope.
François : salaud, phallo. Inverser les rôles.
Elle reste avec lui durant sa frime dorée parce qu’elle l’aime.
(Un point noir et d’interrogation à la fois : la famille de François, la relation Francine famille ?)
Quand elle revient de vacances, elle ne casse pas parce que plus de fric mais parce qu’il l’étouffe, lui fait peur en voulant le mariage. Elle ne veut pas s’enfermer.
Il faut que Francine soit cohérente :
Cohérons à rebours :
– Si elle refuse la prison du mariage, ça suppose qu’elle soit assez évoluée, disons « féministe », donc ça pose le problème de son acceptation de la frime phallo dorée de François : pourquoi l’accepte-t-elle ?
Réponse : parce qu’elle jouait avec lui sans être dupe. Pas pour son fric, mais pour lui donner une leçon, pour le faire tomber sur son cul. C’est une variante (importante) mais variante quand même du schéma présent
Réponse 2 : parce qu’elle l’aime. Elle l’aime « quand même ». Mais est-il logique alors qu’elle refuse le mariage ? Oui si « elle l’aimait encore mieux avant » et que
A/ il lui fait peur avec sa positivité
B/ Il veut lui imposer un type de vie HLMesque ou pavillonnaire qu’elle refuse
C/ elle n’est pas sûre de leur amour et ne veut pas s’engager dans le mariage à la légère
D/ A+ B + C = devant sa possessivité et la vie qu’ils mèneront, elle n’est pas sûre d’elle et d’eux.
De toute façon, conséquence de cette modification :
– Plus de Marco. Il faudra amener le jeu autrement
– Attirance physique de François pour Francine très vive : c’est ce qui le fait s’attacher à elle + le fait qu’elle l’émeut en l’aimant + un mécanisme où il sent qu’il ne la touche pas en frimant, mais s’entête par phallocratisme et une forme d’amour qui lui est propre (jusqu’au retournement du chantier) (amour fier et pudique).
– Si plus de Marco : plus de retour de Francine à Marco. Plus de bagarre dans le chantier
– Modification de l’attitude de Francine vis-à-vis famille (elle ne peut plus se comporter comme ça) et vice versa. Il faut pourtant qu’il y ait opposition (mais pourquoi ?)
Quoique : l’opposition n’est peut-être pas nécessaire. Elle n’est nécessaire que par rapport au refus d’aller à l’enterrement du père, mais elle peut refuser parce que c’est fini entre eux en disant « qu’elle aimait bien son père, mais qu’elle ne peut pas venir à son enterrement, que c’est pas possible, qu’il comprenne… »
Elle peut au contraire s’intégrer à la famiglia et être séduite, attendrie par le côté chaleureux (cf. détails du salut matinal et autres).
De toute façon : ce qui est très positif dans cette nouvelle version, c’est que :
François ne va pas comprendre et accepter le refus de Francine de se marier. Il va être persuadé que c’est parce qu’il n’a plus de fric.
Il va donc la relancer et être brutal, alors que ce n’est pas vraiment fini entre eux et c’est cette brutalité qui va provoquer la rupture définitive.
Indéniablement tout ça est, de toute façon, bien mieux.
La gamberge parano de François sur le manque de fric entraînant la solitude schizophrène, c’est très fort.
VÉCU – FEMMES
Je viens d’appeler chez Bertrand – Totor – Gigicque, pour les voir.
Tombé sur Zaza.
Ce dialogue avec elle et sa voix (très jolie) m’a fait mesurer qu’avec Pierrette il me fallait sortir de l’obsession.
Brigitte S. (c’est « l’inconnue »)
23/02/1978
VÉCU – CINÉMA – ÉCRITURE – PROJETS – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Je viens de voir Jean-Claude Bouillon chez lui. J’écris assis sur une chaise du Luxembourg. Il y a un peu de soleil : une percée imprévue du printemps. Quel plaisir de regarder les visages des gens qui passent. Le soleil donne envie d’aimer les gens.
Agréable entrevue avec Bouillon. En suis sorti avec une sensation de satisfaction. Il m’a conseillé de faire lire le synopsis (à réécrire) à un comédien : Jacques Zanetti, « fiancé » à Lise Fayolle d’Actions films.
VÉCU – FEMMES
Pierrette m’a appelé vers 12h30. On se voit ce soir chez Michel et Évelyne. J’ai un peu fait la gueule au téléphone : elle l’a senti. Je crois qu’elle a compris que c’était parce qu’elle ne m’avait pas appelé. Il faut que j’évite à tout prix la possessivité.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Dans BPEF :
Trois styles, trois rythmes (?) :
– nerveux et moderne pour François
– lent et rituel pour la famille
– reportage pour la vie du bâtiment
(?)
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Pour BPEF :
Une scène où Francine s’admire devant une glace avec manteau payé par François et François l’observe sans qu’elle le voie → il en conclut que le fric et ce qu’il procure, elle aime bien ça quand même… !
VÉCU – FEMMES
Parlé ce soir avec Pierrette, en sortant de chez les B..
Lune. Halo. Debout dans la rue.
Sorte de mise au point avant la neige pour que les choses soient claires.
Elle m’a raconté l’histoire avec son italien.
Entre nous la situation reste ouverte. Camaraderie. Amitié. Amour ?
Patience et réalisme
23/02/1978
TÉLÉVISION – PROJET – ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
La route, c’est fait pour se déplacer d’un point à un autre. Pourquoi ne pas déplacer aussi les images ?
→
un auto-stoppeur d’abord sur route de campagne puis sur marches Sacré-Cœur ou autre, etc… ( + son identique )
26/02/1978
(Entremont – depuis hier)
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Pour BPEF :
Une interrogation : le mouvement d’occupation du chantier pour François.
Le sens ? Avec Francine :
– En appartement témoin la « comédie du couple » ?
– Dans « son coin » ? (Il faut garder la comédie du couple en tout cas. C’est fort.)
Autre question : les rapports Francine-François pendant le siège ? Ils ne me paraissent pas pouvoir rester tels que prévu.
VÉCU – FEMMES
Brouillard. J’essaie de travailler sans être isolé (en étant isolé totalement). Petit flip des familles. Fatigue (ce ski !) Et Pierrette toujours loin, de plus en plus loin, même. Folie d’espérer, de se raconter des histoires. Folie dérisoire et nécessaire. Pour tenir. Seulement tenir. J’en suis là. Défensive. Guerre de tranchées. Je m’use à résister. Cœur gros.
27/02/1978
VÉCU – FEMMES
Seul au chalet. Pas voulu skier aujourd’hui. À vrai dire : angoisse à l’idée de remonter sur des skis et de redescendre des pentes !
Mes nerfs ! Toujours mes nerfs qui tendent inutilement mes muscles.
À la base : mauvais contrôle de moi. Inutile dépense d’énergie.
Cette nuit : me suis endormi tard. Me tournais et retournais.
Pensé à partir. Plus que pensé, même. Ma décision est presque prise. J’attends encore un peu.
J’ai le chic pour me foutre dans des situations bloquées.
Et puis j’étouffe. Je me sens pris au piège. Rejeté. Rendu à ma solitude. Et je n’ai plus pour solution que de repartir, toujours fuyant, toujours cherchant.
Pourquoi est-ce qu’on ne veut pas de moi ? Je me sens vraiment maudit !
Devant mes yeux, quand je relève la tête : par la fenêtre, le calme de cette petite vallée tachée de blanc…
Je crois Pierrette bloquée dans son échec, faisant tout pour que le monde et les gens ne soient pas différents de ce qu’elle veut qu’ils soient, par masochisme, goût de l’échec, pulsion suicidaire.
Une fois de plus, je ne me sens pas assez fort pour tractionner quelqu’un hors de son ornière. Je suis bien dans la mienne, moi !
VÉCU – AMIS – ZYF
Zyf, je repense à ta lettre. Un des rares rayons de lumière dans mon obscurité.
Que tu as de la chance d’être ainsi heureux !
Si au moins j’arrivais à pleurer un bon coup, ça me soulagerait !
VÉCU – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – TRISTESSE
Je me sens engourdi, anesthésié, comme si on m’avait fait une piqûre de tristesse.
VÉCU – MUSIQUE – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – SOUFFRANCE – AMOUR
J’allume le magnéto. Je passe « Knocks me off my feet » de mon vieux copain Stevie. Je vais regarder par la fenêtre, effaçant la buée.
Par moments, je me demande comment j’arrive à supporter tant de souffrance. Moi qui ai tant besoin d’amour : m’en trouver privé à ce point !
VÉCU -TRAVAIL – TÉLÉVISION – CINÉMA – ÉCRITURE
J’ai essayé de travailler, de me mettre à la réécriture de ce synopsis de merde : pas réussi ! Pas possible.
Je lutte. Je serre les dents. Je ne réussis pas !
28/02/1978
VÉCU – FEMMES – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Du chemin depuis ces lignes…
Retourné à la neige. Avec laquelle j’ai toujours les mêmes (un peu moins, tout de même) difficultés pour cause d’adhésion à des schèmes de virilité, etc.…
Pierrette, ça ne me fait plus ni chaud ni froid… On n’est vraiment pas fait l’un pour l’autre, même pour un moment… Complètement démythifiée, réduite, rétrécie, passée par chez les Jivaros…
La mère B. me fait chier. Une telle connerie, une telle vulgarité ! Pauvre Michel, je le comprends mieux maintenant.
Cet univers de violence, d’intolérance, dont les premières victimes sont les enfants… Pas de communication, pas de vrai sourire. Je ne reste que pour la neige. Je partirai après-demain.
Café. Devant moi, à une autre table : un groupe. Un moustachu aux cheveux longs parle de la « psychiatrie hospitalière ». Chercher, trouver des gens avec qui être bien. Le monde des hommes est malheureusement fait de clans, de milieux hétérogènes et imperméables.
Quelques contacts, de ci de là, pas plus.
01/03/1978
VÉCU – FEMMES – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
9h30 du matin. Seul au chalet. Le soleil sort. À la radio : Mozart, dans l’émission de Bouteiller. C’est la musique de « L’incompris » de Comencini.
Fatigue physique. Nulle envie de faire quoi que ce soit. Fais traîner mon lavage, mon habillage. Suis resté au lit longtemps,. Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais avec une fille et Stefan, qui arrivait là dedans, me la soufflait…
Peut-on concevoir une évidence plus rudimentaire ? Un schème plus grossier ?
(Andante du 23e concerto de Mozart par Pollini – Philharmonique de Vienne).
Je viens de décider de partir aujourd’hui, cet après-midi.
J’écoute à la radio une femme qui a une belle voix et je repense au plaisir que je prenais à écouter la voix de Pierrette au téléphone.
Je peux – en ce moment – aimer une femme pour sa voix. N’est-ce pas parce que je suis privé de contacts autres que je fais de l’écoute d’une voix une relation sexuelle ?
Annecy. 17h30. Café en face de la gare. J’attends mon train.
Me voilà rendu à ma solitude et à mes fantasmes.
« Amuse-toi bien » a-t-elle dit en me quittant. Oh que je vais bien m’amuser…
C’est drôle comme les villes qu’on traverse peuvent vous paraître passionnantes ou fades…
Dans le train Annecy-Paris. 17h57.
Le ciel est très bas. Une nappe de nuages violacés commence d’adhérer au sol comme un vêtement gluant s’applique sur la peau…
L’espoir… qui nous fait vivre !
Le train passe sur un fleuve qui roule furieusement, gros de toute l’eau de cette fin d’hiver.
Ma solitude me gâche l’approche du printemps.
Il y a des gens dans ce wagon.
Je ne parviens pas à ne pas être curieux des gens, de leur vie, de leurs sentiments.
L’espoir, qui nous fait vivre…
Ma cigarette fume dans le cendrier.
Mon bras, soumis à rude épreuve, me fait mal. J’évite les gestes inutiles. Faiblesse physique. Faiblesse morale. (J’ai tout de même fermé ce cendrier, de l’autre bras).
Allons au bout des choses :
Il m’arrive de repenser à ce mot de Pierrette « Peut-être la chance de ma vie »…
A-t-elle eu peur ?
Ce ne serait pas la première à qui je fais peur…
Exigeait-t-elle plus de moi ? Plus de temps, plus de patience, avant d’entrer dans un amour « absolu » ?
Ce n’est pas impossible.
Mais alors :
– Elle n’en a, à moi, rien laissé paraître, s’appliquant à être neutre.
– Je ne voulais pas aller jusque-là. Assez de l’amour unique, paralysant, solennel.
En un sens, ma solitude, je me la fais aussi.
Ne suis-je pas volontairement passé à côté « d’occasions » (Danielle – Joer…)
ÉCRITURE
Le roi des rats rata son rot.
VÉCU – SANTÉ
Mal. Mal au bras.
19h45.
Le vendeur ambulant du train vient d’ouvrir la tablette devant moi pour y poser mon sandwich. J’y vois écrit : « No fun »
Le hasard matérialise mes sentiments…
De plus en plus mal au bras
ÉCRITURE
Au Café du quotidien
Au café du quotidien
on boit de la bière chaude
Il y a des types qui sentent des pieds
Et des journaux de l’avant-veille.
On est en retard chaque matin
Et on maudit le réveil qui n’a pas sonné
(parce qu’on a oublié de le remonter)
On se fait peur dans la glace, alors
On recourt à des subterfuges
On demande un whisky soda
et on vous sert une orangeade poisseuse
On prend des rides
on prend des plis
On repasse son existence
Une dernière fois, on va voir la vieille maison
avant qu’elle ne disparaisse
On traverse en dehors des clous
On perd son écharpe dans la boue
Il y a du riz à la cantine
On échange un bonjour fatigué.
Il y a des jours plus quotidiens que d’autres,
si c’est possible.
Il arrive des choses auxquelles on s’attend
Et les chose auxquelles on ne s’attend pas
N’arrivent pas
« C’est comme ça » dit le facteur
Et il ne vous tend pas de lettre.
Ça pourrait continuer longtemps
Et ça continuera comme ça.
VÉCU – FEMMES – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Je repense soudain à ce « Amuse-toi bien… » A-t-elle cru que je m’ennuyais à cause d’elle, de ce qu’elle est ?
A-t-elle senti un fossé entre nos cultures, nos milieux ? Je me pose la question car je crains que oui. Un passage d’une conversation au sujet de Michel et Évelyne me fait penser cela. Chose – si c’est cela – la plus triste est la plus réelle : on ne s’assemble que si l’on se ressemble (« La dentellière ») Peut-on – quelque part – se ressembler assez pour passer par-dessus les dissemblances culturelles ?
LITTÉRATURE – LECTURE – ÉCRITURE
Je viens de terminer « Tendre bestiaire » de Genevoix. Un vieux con, sans aucun doute. Fondamentalement réac. Mais certains passages m’ont plu (le lièvre) ou fait rire (le charcutier avaleur de saucisses).
Pourquoi – comme dans 17 carnets avant celui-ci – est-ce que je n’écris plus de « notes de lecture » ? Je pense à celles sur Bachelard, par exemple. Jeune esprit en pleine découverte, à l’époque. Aujourd’hui stérile et incurieux, je n’ai plus la force de chercher.
Acheté Céline « D’un château l’autre ». Prodigieuse écriture, Céline. Pas encore lu celui-ci mais je sais que je m’y pendrai comme aux autres.
Acheté aussi Nimier, « Histoire d’un amour », à cause du titre.
(« Tendre bestiaire », me fait penser, ce titre, à un bout de conversation avec Pierrette : « Petite bête dans sa fourrure » : ça + la tendresse → acheté le bouquin.
Psychanalyse de librairie.
ÉCRITURE
Dans librairie, il y a libre, je n’y avais jamais pensé ! (2014 : from Internet : fait)
VÉCU – SANTÉ – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Moins mal au bras maintenant. Moins angoissé aussi. Tout à l’heure, je me tortillais sur mon siège. Je cherchais ma position.
Avoir une « position ». Il y a là une notion d’immobilité, non ?
« Je vais faire les questions et les réponses, je serai moi seul. »
Six heures ont passé depuis que j’ai quitté Pierrette.
Allez, c’est loin derrière, déjà.
CHANSON – ENFANCE – MÉMOIRE
Chanson d’enfance :
« Quelle heure est-il ?
Voici un jour nouveau
Qui se faufile
À travers les carreaux… »
Quelle heure est-il ?
Voici un jour nouveau.
Quelle heure est-il
Quelle heure est-il
Quelle heure est-il… »
(Il est 22h05)
VÉCU – ÉCRITURE – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – HUMOUR
En m’apercevant que j’aurais besoin d’un humour grinçant pour échapper à la complaisance qui s’étale sur ces pages, je me dis que l’expression forme la pensée.
(23h20)
Le train vient de passer près du cimetière où est enterré Nini.
Dans l’ombre : les formes vaguement claires des tombes. Chaque fois que mon trajet me mène là, je pense à lui.
Souvent je me demande : « Qu’est-ce que je fais de ma vie, moi qui reste ? »
VÉCU – FEMMES – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Revenons une dernière fois à Pierrette pour tirer la conclusion : bourrage de crâne.
Elle n’avait pas envie de m’aimer. Tout simplement. Se méfiait des complications avec moi. Histoire banale. Échec habituel.
Passons à autre chose.
02/03/1978
ÉCRITURE
« Bien reçu message pathétique Stop Enverrai pensées affectueuses quand j’aurai le temps Stop »
Et merde !
03/03/1978
ÉCRITURE
Tu es superficielle et vaine…
Tu es triste et emmerdant…
03/03/1978
ÉCRITURE
Le perd-son-âge… (2014 : from Internet : fait)
CINÉMA – ÉCRITURE – PROJET – COURT-MÉTRAGE
Comment ne pas m’apercevoir que ce scénario de court-métrage sur le type qui retrouve la fille 15 ans après, c’est la matérialisation de mon schéma interne :
Un adolescent attardé, accroché à une conception de l’amour qu’on peut appeler « de jeunesse » et qui, déçu par le présent de l’âge adulte, est incapable d’y vivre (le suicide).
Tout ce que je « crée » est un ressassement de mon « intérieur ».
VÉCU – MUSIQUE
17h30 – FIP – musique classique chouette.
Concerto pour deux violons Jean-Sébastien Bach – N° 25 38330 Deutsche Grammophon
04/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Agnès est ici. Couchée sur la banquette. Elle a tenu à ce qu’on dresse autour de son lit une barrière faite de chaises, de tabourets et de la porte du placard qu’elle a tirée contre la banquette. Au-dessus d’elle, contre le plafond : le ballon bleu acheté au jardin d’acclimatation.
On y a passé l’après-midi après avoir été au restaurant chez Bébert.
Elle a fait tous les manèges, toutes les balançoires, tous les jeux (les animaux, ça ne l’intéresse pas). Très détendue, rieuse. Ça s’est très bien passé. On est rentrés ici, elle a préféré rester dessiner pendant que je faisais les courses. On a mangé tous les deux sur la petite table. Un côté dînette. Le repas venait juste de se terminer, on a sonné. C’était Jocelyne. À peine entrée, elle a commencé à pleurer. Agnès, heureusement, ne s’en est – apparemment – pas aperçue. Elle devait aller chez Marie-Odile, qu’elle a relancée.
Elle a dit qu’elle n’irait finalement pas. Elle dit que je lui manque, qu’elle ne comprend pas, que je disais que j’étais bien en rentrant à la maison, que je faisais des projets.
Moi, j’ai parlé de la complicité disparue, du plaisir d’être ensemble oublié, de la tendresse enfuie, de notre vie sexuelle impossible.
La petite, entre-temps, prenait son bain. Je devais la coucher. Elle est partie. Agnès a bien pris son départ, sans réaction autre qu’un « Au revoir maman… » plutôt joyeux.
De temps à autre, Agnès me dit « Je t’aime » ou vient poser sa tête contre moi. Les doux moments !
05/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Dimanche soir. Je viens de rentrer après avoir été voir un des premiers films de Scorsese « Bertha Boxcar » (qui m’avait attiré parce que j’aime les séries B).
Auparavant longue discussion avec Jocelyne. De ces discussions dont je n’ai jamais réussi à me souvenir des détails et qui m’ont toujours laissé une boule d’angoisse et un goût d’échec.
Je peux au moins noter qu’elle a été successivement jusqu’à envisager : – qu’on vive ensemble dans mon studio (pour changer) – qu’elle devienne ma « meilleure amie » – qu’on fasse une analyse à deux…
Elle a pleuré. Je l’ai consolée, du moins j’ai tenté. J’avais de la peine à la voir souffrir.
Propos d’Agnès qu’elle m’a rapportée :
Mon Papa, il est parti et ne reviendra plus
Moi, j’ai plus de papa, parce qu’un papa sans maman, c’est plus un papa…
Et à moi, en descendant de chez Odette :
Pourquoi tu as quitté maman ? Puis se reprenant : « Non, on parle plus de ça et ne le dis pas à Maman sinon elle va me gronder… »
Demandé à Jocelyne, qui ne lui a nullement fait ce genre de recommandations.
Non, le tabou sur ce sujet vient d’elle. Comme je voulais prendre des cassettes et que Jocelyne s’y opposait, en voulant me les prendre des mains, Agnès a commencé à pleurer parce que « Jocelyne me grondait ». Plus tard, elle s’est relevée et est venue nous voir qui parlions dans le salon, demandant pourquoi « Maman pleurait ».
06/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Ce matin, nez pris. Gros rhume. Pas envie de bouger (surtout pour aller au froid). Assez grande tristesse. Dehors : soleil, mais il ne me réjouit pas, il n’y parvient pas.
Jamais le « Je suis très aimant, mais j’attire peu » ne se sera appliqué à moi comme en ce moment…
Ce soir, je suis triste, j’ai été triste toute la journée en pensant à Jocelyne et à son chagrin.
Faire souffrir les autres…!
MUSIQUE
« Le moustique » par Gotainer 33 Tours Philips
07/03/1978
VÉCU – SANTÉ – AMIS – LITTÉRATURE – ÉCRITURE
Hier soir, Bertrand est venu m’apporter des médicaments et jouer aux échecs. Nous avons parlé de littérature (je lui ai montré mes poèmes, ainsi que « Lucile » – j’en avais envie), de cinéma (il a lu « Les orages »), de femmes (je lui ai raconté Pierrette qui lui a paru être un piège évident. Il m’a raconté ses histoires à lui).
ÉCRITURE
Quand on lui dit :
– C’est quoi, votre métier ?
et qu’il répond :
– Fumiste…
Ca fait pas sérieux…
VÉCU – FEMMES
Brigitte
poste 331 Monttessuy
734 47 11 ← Je l’ai rencontrée par hasard, ô merveille, hasard, vieux chien qui ne viens pas quand on t’appelle, vieux pelé à l’échine rude, vieux sauvage ! Que je t’aime, frère en métaphysique… !
Et elle était là, tout d’un coup, face à moi, exactement, elle, celle dont je n’ose même pas rêver et, son sourire, oh, ce sourire !
J’ai attendu avant d’écrire cet instant, attendu d’être seul, d’avoir le temps, pour y penser bien, pour l’écrire bien. Et les vapeurs flottantes de l’alcool des amis de chez qui je sors ne sont, ma foi, pas si contre-indiquées pour cette tendre rêverie… À la juste mesure de cette rêverie.
Oh : ne pas formuler. Ne pas briser les choses avec des mots trop lourds… Garder, garder intacte cette chaleur diffuse, ce rayonnement.
Évoquer seulement cette étreinte profonde entre nous, mon baiser sur sa main, ce désir commun d’être ensemble, cette promesse de se voir, cette attente patiente d’être ensemble.
Et que je ne t’oublie pas, toi non plus, ancienne amie, Danielle, entendue juste au téléphone aujourd’hui, voulant me parler, me voir, rapide, prompte à venir vers moi.
Comment être mesquin devant des femmes si belles, dans leur cœur, dans leur – on n’a pas trouvé d’autre mot – âme.
LITTÉRATURE – ÉCRITURE
On ne peut aimer Céline que contraint et forcé.
08/03/1978
VÉCU – FEMMES
Quel acharnement étonnant à aimer à tout prix…
VÉCU – MUSIQUE
Isabelle Maillereau, j’aime bien ce qu’elle chante…
VÉCU – ÉCRITURE
J’ai la lampe dans la gueule → (écrit un texte à partir de ça).
09/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Je me souviens que, samedi dernier, alors que Jocelyne était là, Agnès, entendant la radio, s’est exclamée : « T’entends la musique, c’est la musique des « Parapluies de Cherbourg »… ! »
VÉCU – FEMMES
Alors… Où en sommes-nous ? Petit bilan.
– Rendez-vous avec Brigitte : manqué. Par suite de malentendu. Elle m’attendait au bureau, je l’attendais au bistrot. Je l’ai appelée. On remet ça la semaine prochaine.
– Passé voir Bertrand, puis avec Totor : « Hiroshima » pour la 11eme (?) fois. Puis dîné à la « Toque blanche » avec Martine C., Stefan and Co. Pas terrible.
Seul. Toujours seul dans ce putain de lit.
11/03/1978
ÉCRITURE
– C’est sciemment que tu fais le con ?
– Je fais le con avec patience…
– Qu’est-ce que tu veux dire ?
– Ben oui, je fais le con pas sciemment… (2014 : from Internet : pas fait)
(mauvais !?)
VÉCU – TÉLÉVISION
Il est 3 h de l’après-midi. Dehors : super soleil. Je me suis couché à 5 h (bouffe avec ceux de Rue de Clery + cinéma à minuit (« Bal des sirènes ») puis Bar Belge. Mais : pas géant. Je me fais souvent chier dans les soirées avec plein de gens. Parce que je ne m’y sens pas à l’aise et pas à l’aise parce que ne participant pas au spectacle collectif donné par chacun tour à tour (d’une manière aléatoire, mais rigoureuse). En retrait. Je désire les gens et, avec eux, j’ai envie de partir. Ce que j’ai d’ailleurs fait, tout seul.
Hier vendredi, donc : re-mixage en catastrophe de l’interview de Marc pour la prostitution pour cause de Garat en crise qui m’a reproché au téléphone de mettre « comporté comme un malpropre ». Suite à quoi, j’ai longtemps hésité entre écraser et basculer dans la violence et la sécession.
Donc pas déjeuné avec Danielle, mais on s’est un peu vus au bistrot, puis remonté avec elle au bureau et repartis ensemble jusqu’à la bagnole, où elle a appris que j’étais parti, alors que je croyais qu’elle le savait par Chalut-Brigitte.
On doit se revoir la semaine prochaine. Je lui ai fait comprendre que je voulais la voir seule.
Le synopsis n’avance pas. Je m’aperçois peu à peu que le changement de Francine pose de nouveaux problèmes à résoudre et non résolus.
Demain : premier tour des élections !
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Tout à l’heure Jocelyne m’appelle et met le téléphone devant Frédéric Mey. Je lui dis que ça n’a pas l’air d’aller. Elle pleure. Agnès est « devant la télé ». Je gueule qu’elle y est toujours, qu’il fait beau, qu’elle pourrait sortir, qu’elle est en train de bousiller cette gosse, de ne pas tenir son rôle de mère. Je suis furieux. « Tu ne comprends rien ». Elle raccroche.
Elle m’angoisse
VÉCU – FEMMES – ANNE
Sorti faire course. Bavardé avec la libraire. Mignonne petite hyper remuante.
Proposé sortir ce soir. Elle va voir Lavilliers. On en recause lundi.
12/03/1978
VÉCU – POLITIQUE – – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Jour des élections (1er tour)
Je m’en rappellerai que ce premier tour aura été un lendemain de fête (en boîte, au Bilboard, puis Provins) Rentrés à 8 h du matin à la maison.
Hier soir, Jocelyne rappelé. J’ai essayé de la secouer.
CINÉMA – ÉCRITURE – PROJETS
1/ Entreprise en grève. Seuls continuent à travailler deux ou trois travailleurs fidèles. Le patron, pour les aider à maintenir un semblant d’activité (qui n’est qu’un résidu, toute l’entreprise étant paralysée) se rapproche vachement de ces employés et se transforme en garçon de course, homme de ménage, etc. va leur chercher café, etc.
2/ Un homme… Une femme… Côte à côte. Habillés (ou successivement ?) → Nus. À côté d’eux : leurs vêtements, épinglés, et tout ce qu’ils ont sur eux, chaque élément séparément.
Puis eux deux réunis : nus
Puis la réunion des éléments. (Vêtements masculins, féminins, réunion (échanges – rapport ?) Des billets de banque – etc.…
VÉCU – FEMMES
Intéressant à noter : hier soir, il y avait avec nous Sabine. Fille hyper froide, quasi boudeuse hier soir, à 100 000 km de toute communication (avec moi). Intéressant comme s’écroule un mythe (relire mes notes sur elle : c’est dingue de se jeter à la tête des gens comme je le fais !
Je chemine – lentement – L’aiguille de ma boussole doit se calmer…
J’ai décidé de ne plus me laisser aller, sur ces pages, à ces épanchements complaisants…
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Je n’arrive pas à définir ma nouvelle Francine.
J’ai pensé ces jours-ci à la faire jouer. Intéressant pour l’image d’une fille qui joue aux cartes avec des mecs. Chose rarissime. Évoquant le western (« Johnny Guitar »), mais c’est tout. Je crois que ça complique inutilement les choses.
Le problème c’est qu’il faudrait que le malentendu François-Francine ait des origines plus solides qu’une scène seulement (comme celle du vison).
Quoi que : si ça se passe seulement dans la tête de François, ça accentue encore plus son côté parano, agi par des valeurs d’autant plus fortes qu’elles fonctionnent en autonomie.
Et puis : ça m’embête de faire de Francine une fille trop « libérée ».
14/03/1978
VÉCU – AGNÈS
(3 h du matin)
Allé avec Françoise voir « Haro ».
En face de moi, accroché à la bibliothèque : le ballon bleu d’Agnès. Lentement, il se dégonfle. Néanmoins, après ces quinze jours, il reste encore un peu d’air…
VÉCU – AMIS
Je repense à la rue de Cléry. Trop de monde, pas assez de communication. Finalement j’étais mal à l’aise. Des individualités au contact plus facile (parce que je les connaissais avant) : Bertrand, Totor, Thierry, Jean-Luc.
Finalement, cette décontraction, ce libéralisme, ce « fais ton truc dans ton coin », ça ressemble beaucoup à un truc très simple : l’indifférence…
16/03/1978
Vécu
(Matin)
Bien : bilan :
– Brigitte : non. Une erreur de plus. J’avais raison de ne pas oser rêver.
– Danielle : je l’ai vue hier. Coup de tonnerre dans mes oreilles : elle est amoureuse, heureuse, elle vit avec Joëlle !
– Stefan, hier : ça s’effiloche tellement que ça suffit comme ça.
– Rue de Cléry : trop de monde. Annie : du large. Henri : pas vu depuis des mois.
Michel : trop loin, trop absorbé.
Etc., etc. Autour de moi, il n’y a plus personne
Hier : super grand flip des familles. Hier soir : commencé à récrire Bianchetti. Ça m’a fait du bien. Je m’enferme et j’attends.
17/03/1978
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
J’ai du mal avec cette réécriture de Bianchetti.
J’ai réfléchi récemment à cette modification du personnage de Francine.
Dans l’ancienne version, indéniablement, ce film « rendait compte » de mon Œdipe mal résolu (relations avec la Femme impossible → on s’identifie au père en s’abîmant dans sa mort).
Il m’apparaît clair aujourd’hui qu’il a fallu que je parte et que je revienne à ce stade adolescent où tout reste possible, où la vie reste à faire, pour redécouvrir un personnage de femme « possible », positive et, dans la nouvelle version, la mort du père (identification à lui un stade supérieur, dialectiquement parlant) apparaît comme le début de la résolution de l’Œdipe, le nouveau rapport avec la femme en étant la prolongation (je tiens compte là des derniers développements – non écrits – à savoir le fait qu’elle lui démontre le sens suicidaire de son acte et le pousse à se rendre pour entamer une nouvelle vie, une nouvelle action, de nouveaux rapports).
VÉCU – FEMMES
Il y a une version « optimiste » de mes notes d’hier : c’est vrai que j’ai perdu mes illusions, que j’ai pris toute une série impressionnante de claques, ces derniers temps. Je crois qu’ainsi je commence à assumer cette solitude qui est, de toute façon, notre lot à tous, c’est-à-dire notre liberté. Je sais que c’est quand je ne les attendrai plus que les choses arriveront. Mais il est plus important que je n’attende plus qu’elles arrivent.
Me durcir. Être moins vulnérable.
20/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Premier jour du printemps : je suis resté couché toute la journée avec la crève !
Hier : sinistres élections ! Après avoir ramené Agnès, je suis resté pour regarder la télé. Comme je voulais rentrer dormir ici, Jocelyne s’est mise en rogne. Elle m’a frappé, menacé d’une bouteille. Puis elle a pleuré, bien sûr, et parlé de suicide.
VÉCU – CINÉMA
Minuit : je suis venu au Lucernaire voir « Une femme sous influence ». J’entre et la salle est complètement vide ! Première fois que j’ai un cinéma pour moi seul ! C’est marrant, cette solitude qui me colle à la peau même dans des symboles comme ça… !
23/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE – FEMMES- ANNE – AMIS
Avant-hier soir : parlé pendant 1h30 au bistrot avec Anne (la petite libraire). L’ai raccompagnée chez elle et hier soir, elle m’a rappelé. Avant-hier soir aussi joué aux échecs avec Bertrand et Thierry. G. a voulu parler du haschisch. Hier soir ici : Sario (pendant qu’il était là : orageuse discussion téléphonique avec Jocelyne. J’ai refusé son chantage au suicide)
Dans l’ensemble : la solitude reflue…
24/03/1978
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Sandro :
« Ouvrir une charentaise… »
Notes préparatoires docu « La route » à ne pas saisir
VÉCU – FEMMES – ANNE
Hier soir, vu Anne, qui a la rougeole.
Elle est bien, Anne.
Je lui ai passé « Les pas perdus » de Zyf.
VÉCU- FEMMES
Cet après-midi vu Pierrette à la nation pour qu’elle me remette les fringues de Françoise T. Lui ai dit ce que je pensais d’elle et de la manière dont elle mène sa vie. Elle n’en changera pas.
26/03/1978
VÉCU – AMIS – FEMMES – ANNE – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Dimanche de Pâques. Avant-hier soir : je devais aller voir « L’innocent » avec Bertrand (note du 11/04 en relisant. C’est « L’incompris » Lapsus !) On s’y prend mal. Trop tard. Je me retrouve coincé dans un paquet de mauvaises vibrations → discussion avec Bertrand qui croit bien faire en m’aiguillonnant. Je me décortique devant lui et vais jusqu’à lui donner à lire le présent carnet. Il refuse. Je regrette alors mon geste et souffre et me replie. Le lendemain, au téléphone, je lui dis que je n’ai plus envie du repas avec Bouillon, etc. Il rapplique ici. Il regrette. Il est triste de m’avoir fait de la peine (j’ai réagi violemment).
Le soir, on doit se retrouver pour jouer aux échecs et qu’il lise mon début de Bianchetti réécrit. Or il n’a pas la voiture de Totor. Entre-temps Momo m’appelle pour me voir avec Nadine. Finalement ils ne viennent pas. Je me vois donc personne : on devait aller retrouver Bertrand.
Ce matin : Anne m’appelle. Elle a besoin d’un aspirateur. OK !
Je la rappelle pour lui faire écouter Lavilliers à la radio.
Anefrance m’appelle.
Hier samedi, c’est Jocelyne qui m’a appelé, plusieurs fois. Larmes au téléphone. Je travaillais à Bianchetti. Impossible de m’en défaire ! Agnès est arrivée, je l’ai entendue : « Tu pleures ? » Elle lui a fait une bise.
Anne – Anefrance. Des appels de femmes ! Mais trop de solitude, je le crains, m’a ôté l’énergie d’en sortir. Et ça c’est grave. Je suis inquiet.
28/03/1978
VÉCU – AMIS – FEMMES – ANNE – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Avant-hier : après-midi chez Anne. Il y avait des copines à elle. Elle en a eu marre. Elle est sortie avec moi. On est allés voir Bertrand. Elle était heureuse qu’il y ait des gens. Crevée, elle a dormi. Je l’ai ramenée chez elle. Bertrand a lu le début du manuscrit de Bianchetti. Il trouve ça bon. Vu ensuite Anefrance au Bateau Ivre.
Hier : déjeuné à la Mouffe avec Jocelyne et Agnès. Allés au ciné voir une connerie (« Coccinelle ») pour Agnès (mais elle-même a-t-elle trouvé ça bien ?) Puis je les ai ramenées à Pierrefitte. Agnès voulait que je reste le soir. « On va faire une fête ! » a-t-elle dit !
Retrouvé Bertrand et François Maistre. Bonne soirée. On doit se revoir. J’aime ce mec.
VÉCU – FEMMES – ANNE – AMIS – ZYF
Anne m’a appelé tout à l’heure. Elle a fini « Les pas perdus » qu’elle aime. Ça fera plaisir à Zyf.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
J’ai changé les noms de mes personnages : François → Sandro. Francine → Viviane.
ÉCRITURE
A noter de ma conversation du 24 avec Bertrand :
Je pratique une O.P.A permanente… (Offre Publique d’Amour) (2014 : from Internet : fait)
VÉCU – CINÉMA
Depardieu 969 00 86
29/03/1978
VÉCU – FEMMES
Ce soir, il faut le dire : abominable frustration. Vissé à ma banquette, sans énergie pour le moindre geste, à faire le tour des « amitiés » décevantes, à appeler au téléphone, à prendre de temps en temps la bouteille de whisky posée près de moi pour la porter à ma bouche – rictus, remâcher mes manques, mes échecs, mes tentatives ratées, à patauger dans cette flaque poisseuse de frustration.
Tant pis pour toi, sale con, tu savais ! Tu savais ! Et si tu ne savais pas, c’est rigoureusement, exactement, parfaitement, implacablement pareil.
Ah ! Savoir-être beau ! Pour s’apaiser par des fornications de passage !
VÉCU – FEMMES – ANNE
Hier après-midi : chez Anne. Soleil. Ciel bleu. Mais entre elle et moi : rien… Je ne veux pas faire le moindre geste. Je veux être désiré. Je deviens monstrueusement orgueilleux. Je compisse le monde entier.
30/03/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Hier soir, rentré à la maison de bonne heure, je note ce qui précède, puis Jocelyne m’appelle pour recommencer son cirque d’auditions obligatoires. Plusieurs fois de suite. Je finis par décrocher et m’en vais pour aller voir « Mister Goodbar » « . Complet. Furieux, je décide d’aller voir « Elmer Gantry » du même Brooks. Complet aussi. J’atterris à une terrasse de bistrot place Saint-Michel à côté de deux petites. Un type se met à les draguer, mais on sentait bien le dragueur amateur. Or ça marche ! Je décide d’aller à minuit voir « Week-End ». Mais le bistrot à côté de la Clef ferme et j’ai trois quarts d’heure à attendre ! De rage, je me tire. Je tourne en bagnole, l’Arc de Triomphe, l’avenue Foch, le Bois… En rentrant, la déprime est la même qu’en partant !
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – PROJET « APPARTEMENT-TÉMOIN» – « BIANCHETTI PÈRE ET FILS »
Ça fait plusieurs soirs que je rentre dans l’idée de travailler à Bianchetti, mais je n’y arrive pas. Ça ne vient pas. Tout me paraît plat et décevant.
31/03/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE – agnès
Société Icare (pour cerf-volant) ← quel symbole ! Aujourd’hui, les choses ont pris leur vol…
Je viens de raccompagner Jean-Paul chez lui et j’avais hâte de rentrer, de me retrouver seul, pour faire le point avec toi, vieux carnet. Un peu dans les vapeurs de l’alcool (bière).
Si on prend les choses par le début : je rentre du tournage d’un banc-titre de bonne heure et, avant d’aller chercher mon linge à la laverie, je décide de passer à la librairie acheter des feuilles de classeurs (pour Bianchetti).
Je tombe sur Anne ! Vachement étonné qu’elle bosse alors qu’elle ne devait reprendre que demain.
À la fin de son boulot, on se voit au bistrot d’à côté. Elle est venue aider pendant deux heures.
« Qu’est-ce que tu fais ce soir ? » lui demandé-je…
– « Rien »
– « On va au cinéma ? »
On va voir : « Une après-midi de chien ». Auparavant on passe par la maison (c’est la première fois qu’elle y entre) (Je lui fais un thé).
On prend le film dans la gueule (ç’aurait été un autre film, les choses auraient peut-être été différentes). En sortant, l’état émotif dans lequel m’a mis le film me fait la prendre par les épaules. Mais je ne la sens pas et je regrette mon geste. En arrivant rue Saint-Denis, j’en parle, de ce geste, en parlant de la violence et de l’amour.
On s’assoit la terrasse des « Deux saules ». Petit à petit, de complicité en complicité, de sourire en sourire, les choses progressent entre nous (elle me dit qu’elle me fera lire ce qu’elle écrit. On chantonne ensemble « Les vieux » ou « Amsterdam »)
Je parle d’Agnès. « Comment elle prend ça ? » me demande-t-elle. J’en parle un peu, puis « Pas envie d’en parler ». Elle s’excuse. Je lui dis que je ne lui en veux pas. Elle dit que ça lui fait penser à cette gosse qu’elle a gardée et à qui elle s’est attachée et qui vit maintenant à Marseille. Ses yeux s’emplissent de larmes.
Elle me prend la main et la met sur sa joue (une première caresse, plus fugitive, avait précédé celle-ci). La surprise, la joie m’envahissent. Je me jette sur ce moment, sur cette caresse, bien décidé à ne pas les lâcher, à ne pas répéter d’autres expériences.
Je rentre payer. Quand je ressors, un type l’emmerde. Elle réagit violemment. Elle en pleure de rage et part devant elle dans la rue. « Viens, on va se promener » me dit-elle (en avait parlé de ce sujet, des femmes emmerdées par les mecs quand je lui avais dit qu’une fille à qui j’avais proposé un plan pour trouver une rue m’avait regardé d’un air méfiant et que ça m’avait rendu triste. « On se fait avoir tellement de fois » m’avait-elle répondu. C’était quelques instants avant. On se promène dans la rue en se tenant par la taille. Je lui avais parlé de Jean-Paul. Je passe au bistrot où il a l’habitude d’aller demander si on a de ses nouvelles. Or il est là ! Je suis vachement heureux de le revoir. On parle. Il y a là un irlandais. Anne est excitée comme une puce.
Mais nos caresses, au détour de la conversation, continuent et comme nous restons seuls alors que Jean-Paul est parti un moment, nos bouches se joignent. Regards des gens. Je connaîtrai le goût acide de sa langue chez elle, où nous sommes montés, Jean-Paul et moi, après l’avoir ramenée pour cause de boulot demain matin. Là, de même, Jean-Paul aux chiottes, nous avons le temps d’un baiser et moi de lui dire « qu’on se reverrait lundi » (je passerai demain à la librairie avec Agnès).
Quand je la quitte, sur le pas de la porte, elle me fait sourire en me réclamant « un bibi » (sa chatte s’est sauvée, je l’ai ramenée). Elle m’embrasse de la main en me disant « Je t’attends ».
04/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE – agnès
Le 2 avril (dimanche) première nuit chez Anne (chez Nanou).
Le 3 avril : promenade dans Saint-Germain. Première nuit ici.
Au détour d’elle et moi : « Pierrot le fou » : langage commun – chantonnements – dessin d’Agnès pour Anne. Nanou nous rêve (cerf-volant) – un poème d’elle sur le 2 avril – caresses caresses)
MUSIQUE
Quintette de Woody Shaw « Theme for Maxine »
07/04/1978
FEMMES – ANNE – SEXE
Pourquoi éluderais-je ce problème : avec Nanou : impuissance. La tendresse, oui. Le sexe, non. Ce matin, seulement éveillés tôt tous les deux, après en avoir parlé hier soir, j’ai joui en elle, mais seul. Sexe endormi pendant plusieurs jours, une vraie bataille pour le retrouver. Et j’ai été malheureux de cette jouissance solitaire.
VÉCU – HASCHISCH
Avant-hier soir : premier joint. J’essaye d’en parler dans un texte à part. Cette nuit-là, j’ai cru voir clair, mais j’en reviens. Dans ma tête, c’est le clair-obscur, simplement.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Ce matin, une idée : un type achète un livre qui parle d’une femme, de sa vie.
C’est un mince petit bouquin, genre plaquette.
Or, peu à peu, le bouquin va s’épaissir. Chaque matin, le type le découvrira un peu plus épais. À l’intérieur : des passages, des pages nouvelles, qui n’y étaient pas la veille, racontant chaque fois plus de choses sur elle ← (comment ne pas faire la relation avec ma relation avec Nanou ? À moins que ce ne soit plus subtil encore et que ce soit mon histoire et l’histoire de cette plongée en moi qui semble s’être amorcée avec ce « premier joint » ?)
→
Pensé à transformer ce sujet, à le rendre « cinématographique » (avec le bouquin, que faire ?)
Le bouquin acheté par le mec serait remplacé par un film (30 m de 16 noir et blanc, un vieux film ?)
Première projection. Des images où l’on voit beaucoup une fille. Il rembobine et laisse la galette sur le projo. Le lendemain : film par terre, en tas. Curieux ! Il rembobine et constate que le film dépasse de la galette. Il est plus gros. Bizarre. Des copains viennent chez lui. Il leur montre le film et découvre alors qu’il y a des plans supplémentaires, qui n’existaient pas lors de la première vision. Ainsi de suite : au fur et à mesure, le film gonfle. On revoit les mêmes séquences avec un tas de plans nouveaux.
La question : le « premier » film n’a-t-il pas de sens et en acquiert-il un au fur et à mesure ? Ou bien a-t-il un dès le départ ?
D’autre part, quelle chute ? ← J’aime bien ça. Beaucoup même.
Commentaire du 25 septembre 2015 :
Naissance de l’idée du court métrage « Sibylle » qui allait être nominé aux Césars, avoir plusieurs prix et « entrer dans l’histoire du cinéma français »
– Commentaire écrit à 68 ans
08/04/1978
SEXE – RÉFLEXION
Ce matin : pensées dans ma tête. Heureux de les avoir et ne les développant pas, les laissant tournoyer doucement in my crane in leur état actuel. Je savoure que je peux mieux comprendre
« La fusion est impossible »
Sortie du prosaïque, du langage béta, effusionnel
Effusion = fusion
Je les ai laissées filer…
C’était sur l’impuissance et la masturbation…
→
(Espace Cardin – tournage collection prêt-à-porter)
Sentiment de me tromper dans mon interprétation de mon impuissance actuelle : qu’elle serve à empêcher la masturbation… Je ne crois pas que ce soit ça. Mais je n’en suis finalement pas sûr… Je ne sais pas.
Et si baiser, c’était baiser ma mère ?
L’interdit ?
(Si l’interprétation d’Inès était fausse ?) → me masturber serait « faire l’amour avec quelqu’un que j’aime ». La baise permise parce que désir de l’imaginaire.
En fait, je vois deux possibilités :
A – Masturbation = baiser ma mère → impuissance = on évite les autres/on se garde pour la mère (Inès)
B = Baiser = baiser la mère (dégoût – interdit – « souvenir » de l’acte sexuel parental = choc du réel ? (Sortir du bien-être imaginaire de l’enfance) → masturbation = baise imaginaire, seule baise possible. La seule « pure », « enfantine » (touche pipi) (ce qui expliquerait la non culpabilité profonde devant la masturbation).
Je penche pour B. Ce qui se connecte au texte dactylo au passage « impuissance = état permanent ».
C’est vrai que mes cas d’impuissance sont fréquents : Marie-Odile, putes, Marie, l’infirmière, Inès, Danielle, Anne = + Jocelyne, sometimes).
Mais elle n’est tout de même pas permanente. Elle est résurgente. Comment ? That’s the question !
Je noterai que les cas de non-impuissance ne se sont jamais accompagnés de cessation de la masturbation. Jamais en tout cas une semaine sans désir, sans bander comme avec Anne. Je sens, dans ce cas précis, un lien entre arrêt masturbatoire et impuissance, mais qui n’est peut-être pas permanent.
Quelque chose m’a amené à cesser la masturbation : le geste d’Anne. C’est précis. Un ou deux jours avant, c’était encore la branlette.
Le geste. Réel. Physique. Et je me souviens ma volonté de ne pas pousser plus avant (image de mon sexe qu’elle « sentait à peine »)
Et un geste de tendresse. Non sexuel. Pur. Romantique.
Alors si le contact physique avec la femme devient pur, cesse d’être l’image dégoûtante de Papa Maman s’enfilant, la masturbation cesse d’être une alternative, se vide de son contenu singulier d’enfance (l’enfance est là, Anne = 20 ans. Une enfant pour moi). C’est donc la masturbation qui devient « sâle » (jeu de bascule) (je me souviens durant la nuit du premier joint, avoir été obligé de faire appel aux films pornos pour avoir mon premier élan masturbatoire depuis longtemps)
[Il me faut retrouver le « dirty »]
Quand je me disais : « L’impuissance, c’est pour ne pas me masturber. Si je me masturbe, je retrouverai ma virilité… »
Il y a du vrai : par les films pornos, je retrouvais l’interdit, le caché, le dirty.
En Anne, il n’y a pas de dirty. Le rapport virilité-masturbation en est donc parasité, perturbé.
Mais ce rapport n’est pas dirty-baise # pur-branlette. Erreur. J’avais raison la nuit du premier joint en pensant que la solution pour me reviriliser était de faire entrer l’imaginaire dans le réel.
Car je ne baisais et prenais mon pied, comme dans la masturbation, qu’à travers le dirty.
Dirty, les pornos.
Dirty, Jo. Danielle (que j’initiais, le dirty de l’initiation). Myriam. Josette.
Il y a du dirty dans les deux : baise et branlette. De l’interdit violé dans les deux.
Mais par la masturbation je trouve la partenaire idéale, le partenaire dirty, complaisante, prenant des initiatives, offerte, avide, bref tout.
Phrase clé qui me vient : « Avec Anne, je n’étais plus seul… » → liaison : solitude – masturbation – virilité – masochisme
On peut être seul mais en en souffre.
10/04/1978
VÉCU – FEMMES
Et une veste de plus ! Sylvine…
Une petite brune rencontrée à la collection qu’on tournait aujourd’hui. Je crois pouvoir dire qu’avec celle-là, je n’aurais pas été impuissant (mais on ne sait jamais, n’est-ce pas ?) Après la collection été prendre un pot avec elle et ses deux copines (Sylvie et Gisèle, une Polonaise au pair)
Conversation agréable, animée. Tout bien. Moi bien dans le coup. Après, la seule copine qui restait s’effaçant, elle ne « voulant pas rentrer » → Montmartre, boîte où joue Michel S.. Toujours bien. Je la ramène en voiture. On parle de l’heure, on dit que c’est « pas raisonnable » mais que c’est bien de ne pas être raisonnable. Et quand je ne suis pas raisonnable en essayant de l’embrasser, elle me dit qu’elle n’a pas envie (de ne pas être raisonnable)…
Elle a pourtant, dit-elle, passé une « super-soirée »…
Eh, eh ! Rigolade. Ce fut la veste, one more time… ! Mais passé un petit moment, il n’y paraîtra plus. Ce qui compte, c’est que je me bats correctement. J’ai même eu un moment de joie, sur le retour : ça n’a pas « marché », comme dit l’autre, mais c’est possible, tout est possible, tout est « ouvert »
C’est bien comme ça. Je me bats. Je continuerai à me battre.
À noter aussi : Cathy. Une téléspectatrice (et oui !) venue de Troyes pour une collection. 33 ans. Bon contact. Elle a mon numéro. On se reverra « sûrement ». She dixit. We shall see…
VÉCU – AMIS – HASCHISCH
Vu Momo aujourd’hui, venu au tournage. Il a lu « Premier joint ».
11/04/1978
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE COURT MÉTRAGE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Au cours d’une conversation au téléphone tout à l’heure avec Dominique, trouvé la structure définitive et complète de mon nouveau court-métrage.
J’avais trouvé l’idée (géniale) du film qui gonfle, mais je ne savais rien sur le contenu de ce film dans le film.
Maintenant je sais :
Les plans du film dans le film, à la première vision, sont – pour simplifier – des champs. Les images supplémentaires des contrechamps. Et ces contrechamps sont des plans sur lui, sur le type qui a acheté (ou trouvé) le film (ou reçu par la poste ?).
Le film gonfle, depuis le début vers la fin.
Les premiers contrechamps viennent compléter les premiers champs
(Exemple : 1er plan du film dans le film : une fille sur fond de mer – 1er contrechamp : lui, sur le sable, en train de la regarder. Puis : un arbre – contrechamp : voiture qui vient s’écraser. Lui dedans) etc. etc. toujours du début vers la fin. La suite ne changeant pas (en ménageant une phase de gonflement intermédiaire – destinée à exploiter l’idée de ce gonflement sans la parasiter par le thème du miroir)
Or ces redécouvertes successives de son passé descendent le temps, partant d’un point x de son passé, se rapprochant du présent, le rejoignant (il se voit à l’instant t où il regarde le film, comme dans un miroir – plan sur lui à côté du projecteur ?) puis le dépassent et entrent dans l’avenir. Elles vont jusqu’à l’instant de sa mort !
12/04/1978
VÉCU – FEMMES – AMOUR – CINÉMA – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Ce que nous cherchons tous : être aimé…
Je faisais, tel un apothicaire, le compte de l’amour. Les films : moyen d’être aimé par des gens inconnus. Ce nouveau scénario me rend heureux car me rend sûr d’être aimé. J’y crois.
13/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE – SEXE
En ce moment, j’ai la conscience aiguë et joyeuse d’être à une période clé de ma vie. Il se passe des choses.
Depuis l’écriture de « Premier joint » : retrouvé – une fois – la masturbation. Est-ce cela qui a déclenché la suite ? = Retrouvé mon sexe et cet impérieux gonflement, cette pulsation du sang, pulsation de la vie.
Nos rapports avec Nanou changent. Elle ne me paralyse plus. Je suis moi-même avec elle. Parallèlement, je sens monter en elle, de plus en plus fort, de plus en plus présent, un attachement pour moi que j’ai jugé bon de replacer dans le contexte de nos vies : il y a entre nous quelque chose, mais nous ne vivrons pas ensemble, nous avons chacun notre vie, il y aura peut-être des femmes, d’autres femmes pour moi. « Tu ne me le diras pas, m’a-t-elle demandé, ça me ferait plus de chagrin que de bien. » Elle est fragile. Elle m’a appelé au téléphone avant-hier soir : pourquoi ces réactions violentes devant les dragueurs-emmerdeurs : il y a trois ans, elle a été violée. Hier soir, couchés ici, elle m’a dit : « Ne fais pas attention si je dis non à ceci ou cela, s’il y a des choses que je ne peux pas faire. Trois ans après, il y a encore des blocages… » Il y a eu au téléphone un grand silence.
Hier soir, j’avais envie de faire l’amour. Pas elle. Mais ça n’avait pas d’importance. Ce qui comptait, c’était que j’en aie envie. Ça viendra pour elle, plus tard. Entre nous, ce qui est remarquable, c’est le rythme de notre relation, les choses n’ont pas été forcées, elles sont venues et viendront en leur temps.
Musicalité.
Je reviens sur ce moment de « Premier joint » où je parlais de « faire entrer l’imaginaire dans le réel ». Depuis, j’ai été plus loin. Maintenant je désire Anne, par exemple (ou d’autres), mais c’est une femme réelle que je désire.
L’imaginaire a été absorbé par le réel. Le réel est bien plus « amusant » que l’imaginaire, plus excitant, plus riche, plus plein d’aventure.
Une dimension de plus : l’imaginaire, c’est plat. Le réel, ça a trois dimensions (rondeurs, volumes du corps).
14/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Parties d’échecs avec Anne, terrasse du bistrot au coin Boulevard Péreire – rue de Tocqueville, un peu de soleil. Partie interrompue (elle devait aller bosser) et notée pour la reprendre.
16/04/1978
VÉCU – AMIS – FEMMES – ANNE – SEXE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Petit journal de ces jours derniers : choses (plus ou moins) importantes…
Jeudi 13 : suite à une lettre de Liane Willemont, je passe chercher « La saisie » à Drancy, car Raynald Chapuis (Festival du Fantastique de Paris) me le demande pour un festival à Vannes ! Il passe le prendre le lendemain. On échange quelques mots.
Vendredi 14 : je rencontre Stefan à l’AFI. On passe ici chercher « Premier joint ». Au passage on cueille Nanou que je dépose chez elle. Soirée avec Stefan. Il lit. On en parle. Entre nous : dialogue capital. Amitié renforcée. Ensuite : soirée au resto avec Martine (C.), Betsy, Viviane et Elio. Trio qui ne reparaîtra sans doute pas de sitôt dans mon champ. Soirée de conflit né à partir de déclarations invraisemblables dudit Elio suite à quoi moi et surtout Stefan lui tombons dessus « à bras raccourcis » en conchiant ce bon ton de merde qui enjoint d’éviter les sujets « profonds », le soir au restaurant avec de jolies femmes.
Heureusement après : Place du Tertre pour écouter Michel S., que je raccompagne chez lui.
Samedi 15 : Virginie m’appelle. Déjeuner avec Nanou. Parties d’échecs. Puis rue de Cléry.
Parlé (peu) avec Bertrand. Ensuite je passe prendre Nanou. Elle a lu « Premier joint ». On en parle. « D’abord flip et puis j’ai eu très envie d’être avec toi ». On va voir « Lola », puis rue de Cléry. Je refume. Pas grand effet. Je sens qu’elle est attentive à mes réactions. Avant que les autres n’arrivent, nous nous sommes caressés ardemment, nous nous sommes dits que nous voulions faire l’amour. On va chez elle. Elle fait un joint d’herbe. En pleine lumière, nous nous mettons à faire l’amour. Nous sommes profondément heureux car c’est beau, bien, bon. Elle a oublié sa pilule, mais ça ne me bloque pas cette fois-ci. Je suis au mieux de ma forme, je dure très longtemps. Elle prend son pied plusieurs fois. Je tiens sa tête entre mes mains et m’enivre de la voir, la sentir remuer, de l’entendre gémir, jouir et être heureuse. C’est ce soir qu’elle m’a dit « Je t’aime ». Je ne veux d’abord pas jouir hors d’elle (« Je ne veux pas gaspiller mon sperme en dehors de toi »). J’ai de plus en plus de mal à me retenir. Je finis par jouir entre ses jambes. Le matin venu, l’amour, la joie de regarder l’autre nous éveille. Nous refaisons l’amour.
En ce moment, la vie est pleine comme un œuf.
Dimanche 16 : quitté Nanou vers une heure. Après-midi avec Françoise et Lionel (revu « Lola Montès ») Parlé du court-métrage : pensé à ne pas montrer la mort du type (réaction de Stefan) : il se débarrasse du film (comment ? en le brûlant – en le revendant ?) (Je pense actuellement : en le brûlant).
MES PARENTS – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Je m’aperçois que je reparle assez (de plus en plus) souvent de la « perte » de Bobby.
Le problème avec les parents n’aurait-il pas commencé là ?
17/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE – SEXE
Hier soir, juste comme je finissais d’écrire les lignes qui précèdent, le téléphone a sonné. C’était Anne. J’étais sûr qu’elle m’appellerait. Elle m’aime de plus en plus et son amour me fait un peu peur. Je le lui ai dit d’ailleurs : « Il ne faut pas que je te manque… » « Pourquoi ? A-t-elle répondu. Ça ne fait rien… » – « Je te reconnais bien là : passionnée, ne reculant devant rien… »
Mais les beaux, les doux moments entre nous : au téléphone, elle me disait qu’elle avait envie d’être avec moi. « Tu veux que je vienne ? » lui ai-je demandé. « Viens me prendre et je viens pieuter chez toi. »
Quand je suis arrivé, elle m’ouvrait la petite grille de son escalier. Elle portait la robe que lui a offert sa mère. Elle était adorable. Nous sommes restés longtemps enlacés, là, dans cet escalier.
18/04/1978
VÉCU – FEMME – ANNE – SEXE – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Hier soir avec Nanou. Ici. Petit dîner. Musique. Puis l’amour (ensemble pour la première fois !) Elle en avais très envie. Moi, je m’étais d’abord mis en tête d’attendre, mais « la fièvre a monté rapidement ».
Il y a un problème : je guette en moi les signes d’une lassitude, d’un inconfort. Les mots de Stefan me reviennent en mémoire : « Tu te sers d’elle ». Me serais-je servi d’elle ? Maintenant que j’ai escaladé la montagne, ai-je l’obscur désir de la laisser derrière moi pour aller vers d’autres sommets ? Il y a en moi de la tristesse à cette pensée. Et aussi la certitude qu’on ne force pas son destin, qu’il ne faut pas le faire.
VÉCU – FEMMES – DANIELLE – SEXE
Déjeuné aujourd’hui avec Danielle. Fait le point pour elle sur mon évolution. Grand déballage. Parlé de la masturbation. « Je l’avais perçu » m’a-t-elle dit. Je n’avais pas perçu qu’elle l’avait perçu. Chouette dialogue. Adulte. Avec toujours notre vieille complicité, ce quelque chose qui a été entre nous et ne cesse pas, au fond, d’être.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE COURT MÉTRAGE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Je suis à la Périgourdine, place Saint-Michel. Christian vient juste de sortir. Raconté mon scénario de court métrage. Trouvé en parlant avec lui nouvelle variante : le film dans le film serait tout entier situé dans l’avenir du type ! (Donc : lieux qu’il ne connaît pas, situations pas vécues, gens inconnus).
Un défaut à ce schéma : perdu l’idée de progression passé – présent – futur.
Mais noté aussi, en parlant, que l’idée la plus forte est celle du film qui gonfle et que l’idée que ce film montre la vie du type est, d’une certaine façon, parasitaire.
Mais le film-vie concrétise la narration donc un système avec conclusion (même si la conclusion est la destruction pour ne pas trop en voir).
Si pas film-vie : pas de narration, donc système sans fin (pas de raison que ça s’arrête) ou si narration anonyme : conclusion sans vigueur (la « fin » du film : sans intérêt autre que celle du film lui-même).
19/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Dans mon bain. Nanou m’appelle. Elle voulait me voir. Absolument. Elle va mal, elle n’a pas du tout le moral. Je la vois à 1h30. Elle est déprimée. « Souris moi » lui dis-je. « Non. Laisse-moi. » Je me tais. On parle du toubib. Qu’elle dit avoir du mal à aller voir. De Roger, qui doit venir ce soir chez elle. Je lui dis que je ne veux pas y aller, pour ne pas perturber leur relation. « Quand on se voit, c’est en copains » dit-elle. « C’est pas qu’il y ait quelque chose de physique entre nous, c’est… » Elle a un geste de mauvaise humeur. Pourtant, m’a-t-elle dit, c’est la venue de Roger qui l’a déprimée. « On ne vit pas trois ans avec quelqu’un sans qu’il en reste quelque chose. Ça passe ou ça reste. Pour moi, ça reste. »
– « Tu as eu un élan vers lui ? »
– « Oui. »
Voilà. Il est 5 h. La fenêtre est ouverte. Il y a un soleil pas très vif sur le mur d’en face. À la radio : « Richard » – Ferré.
Richard s’éloigne en musique en buvant le « petit pour la route ».
Et Nanou, elle s’éloigne ?
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE COURT MÉTRAGE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
CM :
Film contagieux. tous les films du mec se mettent à gonfler. Couvercles des boîtes qui sautent, pellicule qui se déroule, qui rampe…
Inflation générale.
VÉCU – AMIS – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME – DÉPRESSION
11h30 du soir
Il faut en parler : Stefan au téléphone. Dîner avec lui, Martine, Béatrice et Bérengère.
Très mauvaises vibrations. Le vieux flip est revenu. Exclusion. Infériorité. Agressivité. Parano. Signé un chèque en blanc et parti. Taxi. Rentré ici. J’écris ça. Régression. Chagrin. Solitude. Un beau come-back des démons qui sont tous là autour de mon lit et se regardent en ricanant.
20/04/1978
VÉCU – AMIS – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
Hier soir, après ça, Stefan m’a appelé. Clarifié position. Je découvre jour un peu plus qu’avec Stefan, je me suis lancé dans une analyse « sauvage ». Transfert. Identification.
23/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Dimanche soir. Près de minuit. J’écris assis à ma petite table anglaise. Anne dort (?) enfouie sous les couvertures. On revient d’un week-end à Fontainebleau. Arrivés le samedi vers 5 h à Barbizon, à l’Auberge des Charmettes.
En arrivant, on fait l’amour, deux fois.
Après avoir bouffé, on va se promener en forêt. Il fait déjà presque nuit. Sans faire de bruit, la lune se lève et nous éclaire d’une lumière de projecteur, une lune pleine, incroyablement brillante. La terre tourne, nous la sentons tourner. Nous écoutons le bois qui craque, la sève de ce printemps tout neuf qui monte.
De retour à l’hôtel, re-l’amour. Comme elle le dit elle-même, quand elle fait l’amour avec quelqu’un qu’elle aime, Anne se donne vraiment. Quelle chevauchée !
Le lendemain matin, je n’ai pas envie. Promenade en forêt. Très chouette balade. On s’arrête un moment et on s’endort.
Au réveil, j’ai « presque » envie. Et ce soir, je n’ai pas envie du tout. Ceci joint au fait que je lui ai dit qu’on ne se verrait pas pendant deux ou trois jours, ça coince : « Ça me crée des blocages et ça me met de mauvaise humeur » me dit-elle à propos de l’amour que « souvent » je n’ai pas envie de faire. Je lui remémore patiemment toutes les fois, depuis samedi dernier, où nous avons fait l’amour et lui fais remarquer que la fréquence de nos relations amoureuses n’est pas si basse. D’autre part, je lui demande de considérer les problèmes dont j’émerge. Quant au fait que je tiens à ce que on ne soit pas toujours ensemble, je lui dis que c’est très important pour moi, que j’ai quitté une femme officielle, installée, jalouse, emmerdante et qui me privait de ma liberté.
– « Tu comprends ? »
– « Non. Ça me fait chier… » ←
Elle a donc boudé, ce soir, et s’est retournée pour dormir seule, de son côté.
Je ne suis pas si triste. Juste embêté. Le début de la fin ?
Une chose à noter : dit dans l’amour, très exactement l’excitation qui précède l’amour : « Je deviens dingue… » Voilà qui éclaire d’une lueur certaine mes « crise de folie » : mes crises = substitut à l’acte sexuel ? Stefan avait vu : tension = érection. Moi je vois : folie = fornication.
25/04/1978
VÉCU – AMIS
Christian :
Téléphone = « masque de bakélite »
26/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE – SEXE
« Je t’aime. Nanou » ← écrit hier soir par Anne. On ne devait pas se voir. Je lui ai dit que j’étais libre. Je suis allé la chercher dans un petit bistrot en bas de chez ses parents. Image : bistrot lumineux dans la nuit. J’arrive en voiture. Elle au comptoir, se retournant et m’apercevant. Les « moments » d’un amour. Un titre. Un livre à écrire. Mais ces moments, leur charme, leur émotion, se vivent sans pouvoir s’écrire, se vivent au détour du temps. Ils surgissent et disparaissent.
L’amour, hier soir.
Pour elle, sur moi : un pied très fort, très long, une furie de gestes avides, muscles bandés, moi serrant les dents, littéralement, sous ses coups de ventre… !
27/04/1978
VÉCU – CHOSES ENTENDUES – ÉCRITURE – LANGAGE POPULAIRE
Ivry 21h15 bistrot.
Entendu : « Plus de rillettes, j’ai du pâté… »
Un client : « Pâté Marconi »…
Le patron : « Le Pâté Marconi, il est formidable… Pur chien… ! »
29/04/1978
VÉCU – AMIS – ANNIE D. – FEMMES- ANNE – SEXE – PSYCHOLOGIE/PSYCHANALYSE/MON PSYCHISME
22h45. Bourron-Marlotte, chez Annie où je suis venu avec et pour Agnès (beaucoup d’enfants).
Choses à noter de ces jours derniers :
Le 27 (avant-hier jeudi) au cinéma avec Anne (« Une vie difficile » de Dino Risi).
Elle se lève pour aller aux toilettes. Un peu plus tard, j’entrevois une ombre qui en sort et crois la reconnaître. Je m’attends à ce qu’elle revienne près de moi. Non, personne.
Fin du film. Lumière dans la salle. Je la cherche parmi les gens qui sortent. Pas trace d’Anne ! Je me mets alors à paniquer. Je vais fouiller les chiottes. Je demande aux gens du ciné. Enfin, je sors et enfin l’aperçois qui arrive du bout de la rue. Elle en avait eu marre du film et était sortie quelque temps avant la fin.
Dans cet épisode : plusieurs choses à noter :
1/ Avant de sortir avec moi, elle avait fumé, en compagnie d’un copain à elle, que j’avais ramené en voiture et qui avait en chemin parlé d’un mec retrouvé mort d’une overdose dans des chiottes de café. Fait la relation après. Panique : vieux (?) reste de crainte à l’égard de la came.
2/ Pensé aussi : « Elle s’est tirée comme ça, sans rien dire. Marre de moi. C’est fini ». En un clin d’œil, cette hypothèse et sa possible vérification a balayé mes certitudes, les bases de mon équilibre actuel : retrouvé le spectre de la solitude.
Ne pas la voir, l’éloigner, me conviennent parce que je domine la situation. Et qu’elle est toujours prête à me voir. (jeu du bébé qui jette un jouet attaché à une ficelle dont il tient le bout et qui prend son pied à le voir disparaître et réapparaître quand il le veut).
Physiquement, après cet épisode, j’ai été malade.
Aujourd’hui, 29, à midi, j’avais prévu de déjeuner avec elle, avec Agnès, au restaurant du coin. Avant qu’on ne quitte la maison, elle m’appelle : grosse déprime. Pas de vacances, boulot de merde qui la coince.
J’arrive au resto, avant elle. Pas de place ! Ça me rend furieux parce que 1/ Agnès, que ça m’embête de faire attendre 2/ Anne, qui va arriver (mais surtout Agnès, le fait de la revoir me transformant, me métamorphosant en père, me « réobsessionnalisant » (m’occuper de ma fille, que tout aille bien, que les week-ends avec elle soient bien organisés).
On passe acheter les trucs à la librairie et voir Anne en même temps. Elle : déprimée, pas plus heureuse que ça. Déjà, je le sens.
On va au bistrot attendre qu’il y ait de la place au resto. J’exhale ma colère devant le coup du resto. Elle se cabre : « Roberto, ne t’énerve pas. Déjà, je suis énervée, ça va pas. » – « Qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? » répliquai-je sèchement. Je suppose qu’elle me sent loin d’elle. Elle prétexte d’aller acheter Libé, puis dit qu’elle n’a pas faim. Je mange seul avec Agnès. Repas fini, nous allons lui dire au revoir au troquet où elle est. « Tu m’appelles ce soir ? » demande-t-elle. J’hésite, pensant au côté compliqué de la chose, ici, chez Annie, mais ne lui ayant pas dit que je venais ici, je dis oui, pensant m’arranger.
Un instant, prétextant la nécessité de cigarettes, j’ai essayé de téléphoner de l’extérieur, mais flanqué d’une escorte, je n’y ai pas réussi.
Elle n’a pas compris l’importance du fait que je veuille déjeuner avec elle et Agnès !
Elle m’en a voulu de ne pas la soutenir dans son flip et que je la délaisse pour Agnès.
Je pense que ce n’est pas une crise grave, mais c’est une crise.
Humeur. Compréhension. Séparation.
Elle doit interpréter mon non-coup de fil !
Pourtant, hier soir : très long, l’amour, très fort. Elle a pleuré de plaisir. Moi, j’ai eu un fou rire ! (rire = ma libération principale)
Ce matin, au début de ces trois jours sans elle : deux masturbations.
30/04/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Ce matin, l’ai appelée. Un type m’a répondu. Elle était sortie faire des courses.
Commentaire du 08 août 2017 :
J’avais complètement oublié cet épisode : un type chez elle le matin ! Voilà qui signifie clairement pour moi aujourd’hui qu’elle avait couché de son côté. Or, jusqu’ici, je me suis toujours senti coupable d’avoir eu des relations en dehors d’elle pendant notre histoire. Voilà de quoi relativiser ma culpabilité !
– Commentaire écrit à 71 ans.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE COURT MÉTRAGE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
Je bute sur mon scénario « film qui gonfle ». Cette idée me plaît, mais je ne vois pas comment la traiter. Le film-vie du mec me déplaît. Évoqué en discutant avec Annie D. le film-vie d’une fille qu’il croise un moment ( fin du film au présent ). Il va la voir. Elle s’est tuée. Ça ne me plaît pas non plus. Envisagé, seul, 2 autres schémas :
Film dans le film = film fait par le mec mais les plans se prolongent ( ou commencent plutôt ) et on y voit, toujours, le même personnage mystérieux ( exemple : plan normal : quelqu’un sort et on coupe. Version « gonflée » : on reste fixe sur porte et le personnage mystérieux entre dans le champ.)
Autre schéma : film qui gonfle par addition de plans sur une fille, toujours la même. il sort et la voit. Ils se rapprochent. elle le tue. on s’aperçoit alors que la scène est filmée par un lascar. (*)
Rien de tout ça ne me satisfait vraiment. pas assez pur, pas assez cohérent, surajouté, gratuit par rapport au gonflement. il faut un gonflement cinématographique.
(* : cette version satisferait le plus à ces exigences.)
Je précise les choses en ce qui concerne le point capital : la fin.
Il faut que l’assassinat soit le dernier plan du film et qu’il soit vu par le copain-confident-compère qui vient voir le mec, ne le trouve pas, voit le film sur projo avec du métrage impressionné en queue, met le projo en marche et assiste à l’assassinat, se rend comme un fou sur les lieux et arrive au moment où ambulance, etc. et aperçoit la fille qui disparaît…. (**)
Je précise que le mec achète le film initial parce qu’il est collectionneur et qu’aux Puces, une petite boîte l’a attiré à cause du titre écrit dessus, un simple prénom de femme ( Nadine ? ) et que ce prénom peut être le titre du film ( le mien, le contenant et le contenu ayant le même titre. ( le film est un simple bout, même pas sur noyau, d’un seul plan. ce plan l’a attiré parce que la fille est très belle. )
(** : et le mec qui la filme ? )
01/05/1978
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE COURT MÉTRAGE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE » – FEMMES – ANNE
Je réfléchis aux prénoms‑titres possibles :
– Nadine, donc…
– ** Sybille ( excellent. sybillin. énigme. mystère. ) ← graphie fautive, que j’allais rectifier par la suite → « SIBYLLE »
– Judith
– Alice
– Aline
– Fabienne
Je suis excité comme une puce parce que ce scénario de court-métrage est quasiment FINI ! Et déprimé par le coup de fil de tout à l’heure d’Anne. On va en reparler. Que va-t-il en sortir ? Je me sens coupable et surtout stupide de n’avoir pas su lire en elle. Elle m’aime. Très fort. Peut-être même plus que je ne peux le croire et le comprendre.
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE – COURT MÉTRAGE « SIBYLLE »
OFFICE CRÉATION
Prochaine commission : fin juin
Dossier : alentours Ier ou 2 juin
Commission :
1/ Thierry Garrel (INA)
2/ Patrick Brion (INA)
3/ Louis Chevasson (Affaires Culturelles)
4/ Michael Lonsdale
5/ Claude Weisz (réalisateur)
6/ Jacques Salles (SFP)
7/ Catherine Soisson (épouse du ministre)
8/ Roger Fauriat (FR3)
9/ Bernard Trémège (enseignant école ciné + critique)
10/ Danielle Chantereau (Beaubourg)
11/ Alain Perisson (réalisateur)
9 exemplaires
curriculum vitae
scénario + résumé
éventuellement devis + fiche technique
commission avril
Sur 52 projets :
Subvention :
– Week-end dans les Ardennes : 60 000 Fr
– Réalité rare (Bernard Beldonel) montant inconnu
– L’emprunteur (Patrice Bonafé) montant ?
– Le bois de la foi (Alain Buvard (?) – Gérard Samson) : 30 000 Fr.
+ projets en sursis (6)
14/05/1978
VÉCU – CARNETS
Long (? !) temps d’abandon de ce carnet.
Je me disais : note, sinon tu vas oublier… (et je ne notais pas).
16/05/1978
VÉCU – AMIS – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE
Pas réussi à noter le 14. Pas plus aujourd’hui. Je suis sans force, abattu. Je note sans décrire, pour ne pas oublier, seulement. :
– Virée à Nantes et Lorient avec Christian et Raphaëlle en place de la Claverie.
– Week-end suivant : projet de virée à la Claverie avec Anne. Message de Jocelyne → week-end avec Agnès. Discussion téléphonique nocturne avec Anne.
– Week-end avec Agnès : retour à Pierrefitte désespérant.
Agnès : « Si tu ne reviens pas, quand je partirai pour toujours, quand je me marierai, Maman restera toute seule. »
– « Je ne veux pas que tu partes : quand elle sera seule, Maman va pleurer ».
Crise de larmes chez Anne. Malheureux. Anne téléphone : « Je suis loin. J’en ai marre de ces histoires, je les vis très mal. »
Aujourd’hui, je tourne en rond dans la salle de montage, enfermé dans mon abattement, courant après ce scénario qui ne veut pas se faire vraiment.
19/05/1978
ÉCRITURE – IDÉE SCÉNARISTIQUE
Pensé ces jours derniers :
– À reprendre, pour en faire une nouvelle, l’idée des extraterrestres essayant de contacter l’Élysée par téléphone et tombant toujours sur le même pékin en HLM.
– À écrire un truc de café-théâtre (?) sur le personnage de Joseph, père du Christ.
23/05/1978
ÉCRITURE
Par rapport à la législation excitante… (2014 : from Internet : pas fait)
24/05/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
(2 h du matin)
Anne dort. J’écris assis sur la banquette. Je crois bien qu’en moi, c’est fini. Ils ont disparu, ces moments d’ivresse où j’oubliais le temps et l’espace dans une étreinte, un baiser, dans les caresses et où je savais que nous étions deux à le faire. Déjà, je regarde ailleurs. Déjà, j’ai besoin de reprendre ma liberté. Déjà l’habitude. Le vol est en descente.
27/05/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Hier mixé la mode après deux nuits au montage. Ensuite j’ai dormi quelque chose comme 16 h !
Avec Anne, aujourd’hui, tension. Presque engueulade. « J’ai envie d’être seul. » Elle est partie.
31/05/1978
VÉCU – FEMMES – ANNE
Dimanche, au CEPAV : rencontré Guylaine. Cerf-volant sur un chantier pendant qu’elle conduisait avec Bertrand, qui tenait la portière ouverte. regard par le sas du rétroviseur.
Lundi, elle m’a appelé, pour me voir. Est-il dit que ce cerf-volant jouera toujours un rôle dans mes décollages ? Est-il dit que ce n’est pas une amitié ?
Parlé avec Anne, au téléphone. Elle m’avait appelé. Larmes. Allé chez elle. « Reprise ».
02/06/1978
(3h30)
« Sorti » avec France ce soir. Resto puis à Montmartre écouter Michel S..
Je l’ai pressée, assaillie de mon désir. Moments de flip, car je ne la sentais plus. Puis, en la raccompagnant, tout s’est éclairci :
« Pas envie ce soir »
– « Je peux écouter une chose comme ça » lui ai-je répondu. J’étais heureux. Je l’ai rappelée.
« Je crois que j’étais en train de rêver de toi ».
Ah les amours qui commencent !
Et pourtant, je suis embarrassé. Ironique paradoxe : maintenant, il y en a trop. Entre Anne, France et Ghislaine, qui m’attire et que je vois demain, je ne sais plus « où donner de la tête »… ! Je les voudrais toutes et je sens bien que ce n’est pas possible !
Attention : ne pas lâcher la proie pour l’ombre !
05/06/1978
VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE – FEMMES – ANNE
(2h10)
Reviens du ciné. Séance de minuit au Lucernaire : « Lisztomania ». Merdique.
Week-end avec Agnès : en la ramenant, dans la voiture : crise de larmes.
Ça avait commencé par la question : « Pourquoi tu nous as quittées ? » (Avant, chez Odette : « Tu resteras un peu ? » J’ai été ferme et le plus clair possible. Ça été long, dur. Elle a fini par s’arrêter de pleurer. Et je crois que cette explication sera marquante.
À Pierrefitte : « J’espère que mon mari ne me quittera pas. » – « On va passer des vacances ensemble ? C’est quand ? Un mois ? C’est long ! »
En rentrant, Anne m’appelle. Elle voulait me voir et a mal pris que je lui dise que je sortais ce soir.
J’avais envie de voir France, de faire l’amour avec elle. Je l’ai appelée. Plusieurs fois. Elle me rappelle demain.
Pas de nouvelles de Guylaine. Avec elle, surtout : attendre…
Ce soir, une sorte de vague à l’âme. Sensation d’un moment intermédiaire. Mécontent de moi. Sentiment d’avoir été quelque peu fanfaron, d’avoir cru les choses soudains faciles, trop faciles.
Et puis, il faut vouloir les choses, les vouloir vraiment. On ne triche pas. Pas moi. Je ne peux pas tricher.