Agnès est ici. Couchée sur la banquette. Elle a tenu à ce qu’on dresse autour de son lit une barrière faite de chaises, de tabourets et de la porte du placard qu’elle a tirée contre la banquette. Au-dessus d’elle, contre le plafond : le ballon bleu acheté au jardin d’acclimatation.
On y a passé l’après-midi après avoir été au restaurant chez Bébert.
Elle a fait tous les manèges, toutes les balançoires, tous les jeux (les animaux, ça ne l’intéresse pas). Très détendue, rieuse. Ça s’est très bien passé. On est rentrés ici, elle a préféré rester dessiner pendant que je faisais les courses. On a mangé tous les deux sur la petite table. Un côté dînette. Le repas venait juste de se terminer, on a sonné. C’était Jocelyne. À peine entrée, elle a commencé à pleurer. Agnès, heureusement, ne s’en est – apparemment – pas aperçu. Elle devait aller chez Marie-Odile, qu’elle a relancée.
Elle a dit qu’elle n’irait finalement pas. Elle dit que je lui manque, qu’elle ne comprend pas, que je disais que j’étais bien en rentrant à la maison, que je faisais des projets.
Moi, j’ai parlé de la complicité disparue, du plaisir d’être ensemble oublié, de la tendresse enfuie, de notre vie sexuelle impossible.
La petite, entre-temps, prenait son bain. Je devais la coucher. Elle est partie. Agnès a bien pris son départ, sans réaction autre qu’un « Au revoir maman… » plutôt joyeux.
De temps à autre, Agnès me dit « Je t’aime » ou vient poser sa tête contre moi. Les doux moments !
– Note écrite à 31 ans