VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Agnès est ici. Couchée sur la banquette. Elle a tenu à ce qu’on dresse autour de son lit une barrière faite de chaises, de tabourets et de la porte du placard qu’elle a tirée contre la banquette. Au-dessus d’elle, contre le plafond : le ballon bleu acheté au jardin d’acclimatation.
On y a passé l’après-midi après avoir été au restaurant chez Bébert.
Elle a fait tous les manèges, toutes les balançoires, tous les jeux (les animaux, ça ne l’intéresse pas). Très détendue, rieuse. Ça s’est très bien passé. On est rentrés ici, elle a préféré rester dessiner pendant que je faisais les courses. On a mangé tous les deux sur la petite table. Un côté dînette. Le repas venait juste de se terminer, on a sonné. C’était Jocelyne. À peine entrée, elle a commencé à pleurer. Agnès, heureusement, ne s’en est – apparemment – pas aperçu. Elle devait aller chez Marie-Odile, qu’elle a relancée.
Elle a dit qu’elle n’irait finalement pas. Elle dit que je lui manque, qu’elle ne comprend pas, que je disais que j’étais bien en rentrant à la maison, que je faisais des projets.
Moi, j’ai parlé de la complicité disparue, du plaisir d’être ensemble oublié, de la tendresse enfuie, de notre vie sexuelle impossible.
La petite, entre-temps, prenait son bain. Je devais la coucher. Elle est partie. Agnès a bien pris son départ, sans réaction autre qu’un « Au revoir maman… » plutôt joyeux.
De temps à autre, Agnès me dit « Je t’aime » ou vient poser sa tête contre moi. Les doux moments !

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Dimanche soir. Je viens de rentrer après avoir été voir un des premiers films de Scorsese « Bertha Boxcar » (qui m’avait attiré parce que j’aime les séries B).
Auparavant longue discussion avec Jocelyne. De ces discussions dont je n’ai jamais réussi à me souvenir des détails et qui m’ont toujours laissé une boule d’angoisse et un goût d’échec.
Je peux au moins noter qu’elle a été successivement jusqu’à envisager : qu’on vive ensemble dans mon studio (pour changer) – qu’elle devienne ma « meilleure amie » – qu’on fasse une analyse à deux…
Elle a pleuré. Je l’ai consolée, du moins j’ai tenté. J’avais de la peine à la voir souffrir.
Propos d’Agnès qu’elle m’a rapportés :
– Mon papa, il est parti et ne reviendra plus
– Moi, j’ai plus de papa, parce qu’un papa sans maman, c’est plus un papa…
Et à moi, en descendant de chez Odette :
– Pourquoi tu as quitté maman ? Puis se reprenant : « Non, on parle plus de ça et ne le dis pas à Maman sinon elle va me gronder… »
Demandé à Jocelyne, qui ne lui a nullement fait ce genre de recommandations.
Non, le tabou sur ce sujet vient d’elle. Comme je voulais prendre des cassettes et que Jocelyne s’y opposait, en voulant me les prendre des mains, Agnès a commencé à pleurer parce que « Jocelyne me grondait ». Plus tard, elle s’est relevée et est venue nous voir qui parlions dans le salon, demandant pourquoi « Maman pleurait ».

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Ce matin, nez pris. Gros rhume. Pas envie de bouger (surtout pour aller au froid). Assez grande tristesse. Dehors : soleil, mais il ne me réjouit pas, il n’y parvient pas.


Jamais le « Je suis très aimant, mais j’attire peu » ne se sera appliqué à moi comme en ce moment…


Ce soir, je suis triste, j’ai été triste toute la journée en pensant à Jocelyne et à son chagrin.
Faire souffrir les autres…!

– Note écrite à 31 ans

ÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Tout à l’heure Jocelyne m’appelle et met le téléphone devant Frédéric Mey. Je lui dis que ça n’a pas l’air d’aller. Elle pleure. Agnès est « devant la télé ». Je gueule qu’elle y est toujours, qu’il fait beau, qu’elle pourrait sortir, qu’elle est en train de bousiller cette gosse, de ne pas tenir son rôle de mère. Je suis furieux. « Tu ne comprends rien ». Elle raccroche.
Elle m’angoisse

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Premier jour du printemps : je suis resté couché toute la journée avec la crève !
Hier : sinistres élections ! Après avoir ramené Agnès, je suis resté pour regarder la télé. Comme je voulais rentrer dormir ici, Jocelyne s’est mise en rogne. Elle m’a frappé, menacé d’une bouteille. Puis elle a pleuré, bien sûr, et parlé de suicide.

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE – FEMMES- ANNE – AMIS

Avant-hier soir : parlé pendant 1h30 au bistrot avec Anne (la petite libraire). L’ai raccompagnée chez elle et hier soir, elle m’a rappelé. Avant-hier soir aussi joué aux échecs avec Bertrand et Thierry. G. a voulu parler du haschisch. Hier soir ici : Sario (pendant qu’il était là : orageuse discussion téléphonique avec Jocelyne. J’ai refusé son chantage au suicide)
Dans l’ensemble : la solitude reflue…

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AMIS – FEMMES – ANNE – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Avant-hier : après-midi chez Anne. Il y avait des copines à elle. Elle en a eu marre. Elle est sortie avec moi. On est allés voir Bertrand. Elle était heureuse qu’il y ait des gens. Crevée, elle a dormi. Je l’ai ramenée chez elle. Bertrand a lu le début du manuscrit de Bianchetti. Il trouve ça bon. Vu ensuite Anefrance au Bateau Ivre.
Hier : déjeuné à la Mouffe avec Jocelyne et Agnès. Allés au ciné voir une connerie (« Coccinelle ») pour Agnès (mais elle-même a-t-elle trouvé ça bien ?) Puis je les ai ramenées à Pierrefitte. Agnès voulait que je reste le soir. « On va faire une fête ! » a-t-elle dit !
Retrouvé Bertrand et François Maistre. Bonne soirée. On doit se revoir. J’aime ce mec.

– Note écrite à 31 ans

VÉCU – AGNÈS – 1ÈRE DES 4 FEMMES DE MA VIE : JOCELYNE

Hier soir, rentré à la maison de bonne heure, je note ce qui précède, puis Jocelyne m’appelle pour recommencer son cirque d’auditions obligatoires. Plusieurs fois de suite. Je finis par décrocher et m’en vais pour aller voir « Mister Goodbar » « . Complet. Furieux, je décide d’aller voir « Elmer Gantry » du même Brooks. Complet aussi. J’atterris à une terrasse de bistrot place Saint-Michel à côté de deux petites. Un type se met à les draguer, mais on sentait bien le dragueur amateur. Or ça marche ! Je décide d’aller à minuit voir « Week-end ». Mais le bistrot à côté de la Clef ferme et j’ai trois quarts d’heure à attendre ! De rage, je me tire. Je tourne en bagnole, l’Arc de Triomphe, l’avenue Foch, le Bois… En rentrant, la déprime est la même qu’en partant !

– Note écrite à 31 ans