Ce week-end, Agnès a confié à Mathilde qu’elle préférait s’attendre toujours au pire…
Durable souvenir de sa blessure.
– Note écrite à 36 ans
3ème des 4 femmes de ma vie (1983-87)
Ce week-end, Agnès a confié à Mathilde qu’elle préférait s’attendre toujours au pire…
Durable souvenir de sa blessure.
– Note écrite à 36 ans
Depuis dernières notes :
Dimanche dernier : m’ennuyant, j’arrange un dîner à la maison des B. mais Mathilde fait la gueule : je me mets en colère, la frappe. Agnès, présente, en larmes, essaye de m’arrêter, me gifle. Bagarre générale : Mathilde s’y met aussi, casse miroir, me tape sur la tête avec téléphone, se bat avec Agnès.
Ça s’arrange quand je vais téléphoner à Jocelyne pour ramener Agnès et m’en aller ailleurs.
Mathilde s’excuse. Réconciliation
Plus tard, j’en parle avec Karen et Marion.
Marion parle de « chantage ». Ça me remue.
Je pense depuis à cette idée de chantage (cf. Colette).
– Note écrite à 39 ans
Hier, balade à 5, dans les forêts région Nord. Pour la première fois : passé le volant à Agnès qui a découvert la panique de l’embrayage…
– Note écrite à 39 ans
(11h50 café « Père tranquille »)
Bien. Faisons le point.
Hier : samedi matin. Mathilde se réveille de mauvaise humeur. Me fait un procès : elle n’est pas satisfaite de sa vie = ne fait plus rien. Je ne lui propose rien. On ne partage plus.
Elle menace de s’en aller le week-end. Veut m’empêcher de prendre la voiture pour aller chercher Agnès comme prévu (j’essaye de téléphoner pour dire à Marc d’aller la chercher, mais ça ne répond pas. Je suis obligé de me sauver pour y aller, car elle est en colère et veut me retenir.
J’y vais. M’arrange avec Jocelyne pour rendez-vous afin qu’elle récupère Agnès, car j’ai l’intention de passer la nuit à l’hôtel et ne veux pas imposer ça à Agnès.
(…)
Je rapporte voiture et télécommande parking à Mathilde. Je laisse Agnès en bas et monte. Elle gueule parce que je m’en vais et casse deux miroirs. Me dit qu’elle me demande quelque chose que je réponds par départ : égoïsme…
Après-midi avec Agnès (déjeuner dans pizza rue de la Harpe – « Au cœur de la nuit » – Achat dans librairie à côté du ciné : photos d’« Autant en emporte le vent » pour Agnès + bouquin de Michel Chion sur scénario pour moi (acheté aussi aux Puces livres sur Juifs pour Agnès et cartes postales rue des Écoles).
Métro → rendez-vous Porte de la Chapelle. On va dans un bistrot. Y entrent : Marc et le grand-père L. (grand-père d’Agnès côté maternel). Je les invite à boire un verre.
Ils partent.
– Note écrite à 39 ans
(23h35)
Je commence ce carnet par une note de tristesse et d’angoisse : tout à l’heure, en rangeant mes cassettes, j’ai passé cassette conversation avec parent (pourquoi a-t-elle été effacée ? Il n’en reste qu’un petit bout…)
J’ai entendu la voix de Papa et celle d’Agnès, petite (trois ans ?). Une émotion, une angoisse terribles m’ont étreint… Presque autant d’entendre la voix de mon petit bout de chou que celle de mon père chéri… Mathilde elle aussi a été bouleversée…
Dura lex, sed lex… !
Que faire d’autre que vivre ?
(0h30
Joie ! Pleurs de joie ! Je viens de vérifier : l’autre face de la cassette est pleine !
J’en ai réécouté un petit bout. Je réécouterai tout plus tard, tranquillement (je suis fatigué). Ça m’a fait beaucoup moins mal que tout à l’heure. Au contraire, je suis heureux d’avoir cette trace de ceux que j’aime tant ! Je vais m’endormir plus paisible…
– Note écrite à 39 ans
Fêté mes 40 ans avec Agnès, Michael, Zelda et Patricia et ses deux gosses.
Au moment où ils me chantaient « Joyeux anniversaire » devant le gâteau avec bougies allumées, j’ai pensé qu’un jour je me souviendrai de ces visages d’enfants, lorsqu’ils seront plus des enfants…
Ils m’ont fait plaisir (Michael m’a acheté deux bougies parfumées).
– Note écrite à 40 ans
(21h 30)
Agnès, Zelda et Mathilde regardent « Flipper le dauphin » à la télé.
Elles rient, s’attendrissent sur cette tendre bête…
Quel dommage qu’il n’y a personne à prier pour les protéger, leur conserver longue vie et leur assurer le bonheur…
Personne. Sauf moi-même ?
Pas Dieu, mais homme tendre, gentil, aimant…
– Note écrite à 40 ans
Samedi : reprise de la dispute avec Mathilde sur le même sujet (photo actrice). Mathilde s’en va tout l’après-midi.
Agnès me fait une scène, m’accusant d’à peu près tout jusques et y compris de l’avoir fait naître…!
Je ne cède pas cette culpabilisation. Me montre calme et fort. Ça se tasse.
– Note écrite à 40 ans
Dimanche matin : violence extrême. (Gifle de moi, coup de brosse dans le visage par elle, moi lui lançant des choses à la tête, la saisissant (Agnès me retenant en hurlant d’arrêter, que je suis fou…)
Agnès lui disant de partir. Elle est partie avec les enfants qui assistaient…
– Note écrite à 40 ans
Un mot d’Agnès me revient (elle me l’a dit alors que nous marchions, après la violence terrible du dimanche où Mathilde est partie) : « Tu ne veux pas qu’on t’aime » !
Là est le nœud.
Pourquoi ?
Pourquoi je ne le veux pas ?
Je préfère les situations de conflits, de ressentiment. La voilà, ma triste manière d’aimer.
Pourtant, là tout de suite, je sens en moi le raisonnable désir d’écrire à Mathilde qu’elle m’a donné du bonheur, que j’ai été bien avec elle et lui en suis reconnaissant, que cette relation m’a été douce et que je veux qu’elle dure encore, qu’elle m’apporte la paix en ce bref passage sur la Terre.
Pourquoi est-il si difficile de dire des mots d’amour et de tendresse ? Pourquoi me réfugier dans la rageuse exigence du sexe considéré comme un combat et de la jouissance comme une victoire qu’on arrache ?
C’est peut-être qu’il y a en moi, ce qu’il n’y a pas en elle – parce qu’elle est Femme et moi Homme ? – le goût du combat et de la mort ? Que Sexe et Violence s’entrelacent pour moi et que mordre, griffer, serrer convulsivement sont les gestes d’amour qui me paraissent d’autant plus précieux qu’ils sont dangereux, chargés d’animalité…?
J’ai oublié d’écrire tout à l’heure, à propos de notre discussion d’hier soir, qu’elle m’a dit qu’elle avait peur parce que, peut-être, je voyais en elle mieux qu’elle-même (mais ma mémoire me trahit, là ; n’est-ce pas qu’elle voulait dire que je voyais clair en la voyant plus détachée de moi ? Il me semble pourtant qu’elle a exprimé une peur du sexe… Oui, elle a dit : « Les hommes me font peur, pourquoi ? » Et j’ai répondu, en gros : « Parce qu’on a peur de souffrir. Les hommes aussi ont peur des femmes. »
– Note écrite à 40 ans
Cette nuit : pas de violence (à part coup sur la main de Mathilde mais pas fait exprès : c’était parce qu’elle a avancé sa main au moment où je tapais sur le lit !) Mais : mal. Problème chômage et problèmes sexuels. Je lui reproche de ne pas avoir d’appétit.
J’ai beaucoup pleuré cette nuit. Gros sanglots. Chaque fois que c’est comme ça, c’est ma culpabilité vis-à-vis d’Agnès qui ressort et je pleure en l’appelant…
Je me suis endormi à six h du matin.
Tristesse. Malaise. La seule lumière, ce matin : eu au téléphone Marie-Claude G. qui a aimé « L’amour de loin »…!
– Note écrite à 40 ans